Reportage France

Européennes: au sein de la gauche française, deux visions de l’Europe et une peur commune

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Alors que les élections européennes se tiennent du 6 au 9 juin, RFI a suivi deux têtes de liste aux conceptions européennes opposées : le social-démocrate Raphaël Glucksmann et le communiste Léon Deffontaines.

Raphaël Glucksmann, gauche, candidat Parti Socialiste-Place publique et Léon Deffontaines, droite, candidat Parti communiste aux élections européennes 2024.
Raphaël Glucksmann, gauche, candidat Parti Socialiste-Place publique et Léon Deffontaines, droite, candidat Parti communiste aux élections européennes 2024. © Christophe ARCHAMBAULT / AFP / Montage RFI
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Léon Deffontaines se chauffe la voix devant les 300 militants communistes réunis à Belfort. Pour motiver les troupes, il fait remonter de vieux souvenirs, clamant : « Oui, le référendum de 2005 a été un vote de classe ! » La tête de liste communiste aux prochaines élections européennes n’avait pourtant que neuf ans lors du référendum sur la Constitution européenne, mais un autre intervenant, présent ce jour-là à Belfort, était lui en première ligne…

L'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg, figure du « non » au traité constitutionnel européen, est catégorique. Selon lui, l’équation est simple : plus d’Europe, c’est plus de licenciements, particulièrement dans ce territoire historique de l’automobile où 10 000 emplois pourraient être menacés. « L'Union européenne a pris des décisions de suppression des véhicules thermiques en 2035. Ici, les équipementiers [automobiles, NDLR] perdent aujourd'hui des parts de marché... L'Europe, c'est une passoire, elle est incapable stratégiquement de prendre les bonnes décisions », affirme-t-il.

Une fois n'est pas coutume : à chaque élection européenne, la division ressurgit à gauche. Celle qui oppose une conception plus souverainiste de l’union et une autre davantage fédéraliste, plaidant pour plus de pouvoirs accordés aux instances européennes. Cette année, ce schisme, ancien, a repris de la vigueur dans la campagne des uns et des autres avec l’implosion de la Nupes. « À gauche, il y a deux réelles alternatives sur le projet européen, schématise Léon Deffontaines. Nous, qui critiquons les traités européens, et Raphaël Glucksmann, qui défend cette Europe des vainqueurs de la mondialisation, en niant le fait que cette Europe a favorisé la fermeture de services publics, la désindustrialisation... »

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Justement, quelques jours plus tard, Raphaël Glucksmann, tête de liste PS-Place publique, est venu parler social à Saint-Ouen, en région parisienne, et rassurer : pour lui, l'Union européenne est la bonne échelle pour être mieux protégés. « Quand on a un problème, on estime que c'est la faute de l'Europe. Quand il y a une grande réalisation, en revanche, personne ne raconte que c'est grâce à l'Europe. Il faut que l'on montre que l'Europe, c'est un cadre de protection, que ça protège nos industries et nos emplois », explique-t-il. 

Surtout, selon Karim Bouamrane, maire socialiste de Saint-Ouen et longtemps proche des communistes, l'antique division à gauche ne semble plus d’actualité. « Vous croyez que, quand Raphaël Glucksmann parcours les quatre coins de France, on lui parle du traité de 2005 et des différences qu'il pouvait y avoir entre le Parti socialiste et le reste de la gauche ? Non, on lui parle pouvoir d'achat ! C'est pour cela que Raphaël Glucksmann attire », analyse-t-il. 

Une analyse que paraissent confirmer les intentions de vote : plus de 20% cumulés pour les socialistes et écologistes, à peine 10% pour les communistes et Insoumis. Nina est élue locale PCF et elle désespère de ces retours du terrain. Mais, selon elle, les motivations ne sont pas idéologiques : « Beaucoup me disent faire barrage au RN... » Des électeurs partisans du vote utile. Cumulées, les intentions de vote pour les partis de l’ex-Nupes peinent à atteindre les 30%... Inférieures, donc, à celles du seul Rassemblement national.

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