Reportage France

Jeux paralympiques: le parcours hors norme de l'archer français Damien Letulle

Publié le :

Les premières épreuves individuelles de tir à l’arc ont lieu ce jeudi 29 août sur l’esplanade des Invalides. L'archer Damien concourt en catégorie W1, réservée aux athlètes avec un handicap assimilé à une tétraplégie, avec un déficit aux membres inférieurs, au tronc et à au moins un bras. Un athlète à l’histoire extraordinaire, lui qui a concouru en valide en 1996 aux Jeux olympiques d’Atlanta. À 51 ans, Damien Letulle est le premier archer de l’histoire à avoir participé à la fois aux Jeux olympiques et aux Jeux paralympiques.

L'archer paralympique français Damien Letulle s'entraîne au CREPS (Centre de Ressources, d'Expertise et de Performance Sportives) des Pays-de-la-Loire à La Chapelle-sur-Erdre, près de Nantes, le 12 avril 2024.
L'archer paralympique français Damien Letulle s'entraîne au CREPS (Centre de Ressources, d'Expertise et de Performance Sportives) des Pays-de-la-Loire à La Chapelle-sur-Erdre, près de Nantes, le 12 avril 2024. AFP - LOIC VENANCE
Publicité

Par Élodie Vilfrite

Pour les Jeux paralympiques de Paris, six archers ont été qualifiés – deux femmes et quatre hommes – dont Damien Letulle. Compétiteur né, Damien Letulle tombe amoureux du tir à 10 ans, quand son grand-père lui offre son premier arc. Très vite, les podiums s’enchaînent. En 1996, l’archer a 23 ans. Sa médaille de bronze aux championnats d’Europe lui ouvre les portes des Jeux olympiques d’Atlanta. Éliminé prématurément, il vise déjà les Jeux de Sydney, mais une mauvaise chute bouleverse sa vie. Damien devient tétraplégique. Il passe 20 ans sans tirer à l’arc.

« J’avais du mal à voir le sport de haut niveau dans un corps qui ne fonctionne pas à 100%. Je n’avais pas souhaité en refaire et puis j’avais peur de pas être assez performant. J’étais plutôt investi dans les instances pour faire évoluer le tir à l’arc en oubliant complètement la pratique. Et est arrivé le jour de la nomination des Jeux de Paris, ça m’a donné un tilt. »

Depuis, Damien Letulle s’entraîne sans relâche. En 2020, il décroche le record de France handisport. L’archer pratique deux sessions de tir par jour. Une préparation exigeante adaptée sur mesure pour le champion.

«... Je prends un kif du tonnerre ! »

« J’ai beaucoup travaillé physiquement. Au niveau des adaptations, il y a eu des centaines de prototypes faits pour palier le fait que je ne puisse pas ouvrir mes doigts pour lâcher la corde, ni appuyer sur une gâchette. On a inventé avec des potes ingénieurs une façon de tirer un peu différente, mais qui correspond à ce que je faisais avant. Aujourd’hui, avec les adaptions qu’on a trouvées, j’arrive à prendre beaucoup de plaisir quand les flèches partent et certaines bien parties arrivent dans le jaune. Et là, je prends un kif du tonnerre ! »

Participer aux Jeux de Paris a la saveur de la revanche. D’autant que les épreuves de tir à l’arc se déroulent sur l’esplanade des Invalides. Un lieu intimement lié au parcours de Damien.

« Suite à l’accident, il y a eu une période où j’étais au centre des Invalides, l’hôpital militaire de rééducation, ce qui donne beaucoup de sens à l’événement. Là-bas, j’ai passé du temps à me questionner sur mon devenir. En regardant ce dôme doré par la fenêtre, je me disais : "Qu’est-ce que je vais faire ?" Quand je vois qu’aujourd’hui, plus de 20 ans après, je suis au pied de ce dôme à tirer des flèches, il y a eu du chemin depuis cette période. »

Un chemin remarquable, inscrit jusque dans sa peau. Il y a peu, il a sauté le pas. L’archer s’est fait tatouer les deux avant-bras : à gauche, les anneaux olympiques, à droite, les agitos, symboles des Jeux paralympiques. Les phases finales des épreuves de tir à l’arc auront le 1er septembre.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes