Au Japon, la colère monte contre les funérailles nationales de Shinzo Abe
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Des funérailles nationales vont avoir lieu fin septembre pour honorer la mémoire de l'ex-Premier ministre Shinzo Abe, assassiné le 8 juillet dernier. Depuis 1945, seul l'ancien Premier ministre Yoshida Shigeru, disparu en 1967, a eu droit à ces honneurs.

De notre correspondant à Tokyo,
Shinzo Abe laisse un bilan mitigé. Sa personnalité comme sa politique étaient clivantes, et son parti est très décrié en raison de ses liens avec la secte Moon. Dans l'archipel, ce moment de recueillement national annoncé suscite un énorme débat et les manifestations se multiplient contre les funérailles d'État de l'ancien Premier ministre, prévues le 27 septembre prochain.
Certaines personnalités de la société civile sont particulièrement indignées. « Ils font de Shinzo Abe le héros de la nation. Ne pas se prosterner devant son bilan et sa mémoire, ce serait se montrer anti-japonais. Seuls les régimes totalitaires se permettent cela, c'est insupportable ! », tempête ce manifestant dans le centre de Tokyo. « Le gouvernement espère aussi que le barnum de cet hommage solennel fera oublier sa collusion avérée avec la secte Moon. Ils osent donc le pire : instrumentaliser la mort d'un homme à des fins politiciennes », analyse cette autre femme.
« Ils devraient avoir honte »
Ces manifestants sont très remontés. « Abe a toujours méprisé ses opposants : "ces gens-là", comme il disait. Il nous traînait dans la boue, nous accusait d'être des traîtres à la patrie. On n'a jamais courbé l'échine devant lui, donc ce n'est pas maintenant qu'on va se taire », raille cette femme au cœur du mouvement. « Le gouvernement répète en boucle que cet hommage national va de soi, point à la ligne. Il refuse tout débat. L'argument d'autorité, c'est la marque des faibles. Ils devraient avoir honte », s'indigne ce manifestant.
D'autres sont plus mesurés. « Il me semble que la tristesse à la suite d'un décès, ce serait mieux qu'elle vienne du cœur et pas qu'elle soit imposée d'en haut » s'interroge cette femme. « Visiblement, cet hommage solennel heurte énormément de Japonais. Donc, je trouve qu'il devrait faire l'objet d'une consultation populaire ou, en tout cas et au minimum, d'un débat au Parlement » propose cet autre homme qui a pris part au cortège.
Dans la foule des manifestants, on voit souvent des religieux bouddhistes. Tel ce moine, pour qui ces funérailles nationales vont renvoyer le Japon à un sinistre passé. « Le culte de la personnalité, la population sommée de se recueillir et de prier pour Shinzo Abe, tout cela est effarant. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le shintoïsme n'est plus une religion d'État. Le gouvernement n'a donc pas à se mêler de cela », estime le religieux.
La cote de confiance du gouvernement a dégringolé cet été. En raison de la flambée des prix, de la septième vague – très violente – de l'épidémie, mais aussi du scandale concernant la secte Moon et de la décision prise d'honorer la mémoire de Shinzo Abe fin septembre. Une majorité écrasante de sondés s'y oppose...
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