Reportage international

Kurdistan irakien: Akre, la ville qui a dit non au béton

Publié le :

Les épisodes de fortes chaleurs sont de plus en plus fréquents du fait du dérèglement climatique. En Irak, l'un des pays les plus chauds du monde, les autorités tentent de trouver des solutions pour lutter contre ces températures excessives. Une ville kurde, Akre, a interdit le béton, et ce dans plusieurs quartiers anciens, pour privilégier les pierres jugées plus résistantes à la chaleur.

La ville d'Akre dans le Kurdistan irakien. (Image d'illustration)
La ville d'Akre dans le Kurdistan irakien. (Image d'illustration) Getty Images - Frans Sellies
Publicité

De notre envoyé spécial de retour d'Akre,

Dans les vieux quartiers d’Akre, celui qui utilise du béton risque trois ans de prison. Priorité à la pierre et à la terre. « Ce sont des matériaux bien adaptés à l’environnement de la région, explique Hiwa Shimal Ahmad, l’urbaniste de la ville. Ces matériaux sont aussi meilleurs que le béton pour la santé en plus d’être plus efficace contre la chaleur, le froid et l’humidité. »

Il fait très chaud, plus de 35°C à l’ombre. Mais derrière les épais murs de la maison d’Ismaël, un habitant du quartier, le thermomètre affiche 10° de moins. « Il n'y a pas de climatiseur, se réjouit Ismaël. Et en hiver, il fait chaud, on n'utilise même pas le chauffage. »

Malgré tout, ces maisons anciennes ont souvent besoin de rénovation. Les pierres coûtent cher et les habitants de ces quartiers sont pauvres et parfois réfugiés syriens. « Ma maison a besoin d’être rénovée, ajoute Ismaël. Il y a de nombreuses fissures dans les murs. Mais moi, je ne peux rien faire, je suis fonctionnaire, je n’ai pas assez d’argent. On a dû abandonner cette chambre juste derrière, là. C’est devenu trop dangereux. On vit dans les autres chambres. »

Dans cette pièce, le mur est sur le point de s’effondrer. « Cette loi est irresponsable de la part du gouvernement, précise l'habitant. D’un côté, ils nous interdisent d’utiliser du béton, et de l’autre, ils ne nous aident pas financièrement. Pourtant, cette loi ne concerne que deux quartiers de la ville. Ils pourraient nous aider quand même ! »

Mais l’argent n’est pas le seul frein à la rénovation par la pierre. « Pourquoi il faudrait que je rénove ma maison avec de la terre alors que ma maison est déjà en terre ?, s'interroge Cidra, qui vit dans la maison de son frère dont le toit est en terre. Nous voulons du béton, c’est plus propre ! Au-dessus de notre tête, il y a des serpents et des insectes dans la terre. Ce n’est pas le cas avec du béton. »

« Des quatre autres maisons de ma rue, il ne reste que la mienne, continue Cidra. Les autres habitations se sont effondrées. Les familles sont parties parce qu’elles ne pouvaient pas les rénover avec du béton. Regardez-vous même ! » Dans ce quartier, sur les 1 500 maisons qui ont besoin de rénovation, seulement 25 ont bénéficié de travaux depuis dix ans.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes