Turquie: à Konya, un pèlerinage rassemble chaque année les adeptes du mouvement soufi
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Des milliers de visiteurs venus du monde entier se rendent chaque année dans la ville conservatrice de Konya, en Anatolie, pour célébrer l’anniversaire de la mort du poète soufi Mevlana Celaleddin Rumi, le 17 décembre. Issu du sunnisme, le soufisme propose une doctrine ouverte aux interprétations et à la réappropriation personnelle. Musulmans mystiques, bouddhistes, chrétiens, adeptes du yoga et de la méditation... Les festivités en l’honneur de Rumi attirent des touristes aux profils très variés.

De notre envoyée spéciale en Turquie,
Habituellement calme, le centre-ville de Konya vibre depuis quelques jours au rythme des célébrations du Şeb-i Arus, littéralement « la nuit de noces ». Le turc, l’arabe, le persan ou encore le russe et le japonais, toutes les langues résonnent dans les rues.
Assise dans un café de la place principale, Kenza, 25 ans, arrive de France et découvre sous un jour nouveau la religion de ses ancêtres : « Ils viennent d’Algérie. L’islam a imprégné, même si ce n'était pas une famille très pratiquante, au niveau culturel, c'était présent. Mais après cet éveil spirituel, j’ai fait quinze pas en arrière par rapport à la religion, au dogme, après avoir rencontré Dieu en tant que pur amour ».
Le poète soufi du XIIIe siècle repose ici dans un somptueux tombeau situé au centre-ville. Éric Maupaix vient de Normandie, il est catholique et nourrit une grande admiration pour Rumi : « Ce qui m’attire vraiment chez Rumi, c’est vraiment l’extase amoureuse au niveau de l’univers, du cosmos, de Dieu. Et tourner, pour moi, c’est vraiment un moment merveilleux, c’est vraiment être en osmose avec le cosmos ».
Le sema, la danse giratoire des derviches tourneurs, constitue le rituel le plus connu du soufisme, mais d’autres pratiques viennent s’y greffer comme le zikir et le mesk, des prières en musique.
Un courant de l'islam repris par la culture populaire
C’est aussi le cas des sohbet, des cercles de paroles animés par des sages. Haïle, 41 ans, sort d’une discussion avec Celalettin Berberoglu.
« Quand on parle d’amour, pas besoin de le décrire, non ? De la même manière, quand on parle "d’amoureux", tout le monde sait de quoi on parle, n’est-ce pas ? Ici se rassemblent ceux qui sont à la recherche de l’amour divin. Au-delà de l’amour qui peut exister entre un homme et une femme, les gens viennent chercher l’amour divin ici. »
La dimension universelle des valeurs d’amour et de tolérance rend le soufisme particulièrement ouvert à la réappropriation. La culture populaire s’en est d’ailleurs largement emparée ces dernières années. La mode, par exemple, reprend la robe des derviches et on pratique la danse giratoire du sema dans les mariages et les boîtes de nuit.
Les principes du soufisme sont même repris par la littérature sur le développement personnel au point d’avoir fait émerger un nouveau concept, celui du « soufisme pop ». De quoi conquérir le cœur de nouveaux profanes.
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