Au Kurdistan irakien, les professeurs non-payés sous la pression des autorités pour cesser la grève
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Au Kurdistan Irakien, un million d’élèves n’ont pas école. Depuis le mois de septembre 2023, leurs professeurs ne sont plus payés, comme tous les fonctionnaires de la région autonome. La faute à l’arrêt des exportations de pétrole, principale ressource dans la région, dû à un désaccord avec la Turquie. Les professeurs ont donc arrêté de faire cours et manifestent par milliers tous les dimanches.

De notre correspondant à Slemani,
Les images diffusées sur les réseaux sociaux montrent tous les dimanches des milliers de professeurs grévistes manifester leurs colères chaque semaine à Slemani, deuxième ville du Kurdistan irakien.
« Le dernier salaire que j’ai reçu ? C’était le 4 septembre 2023... » Sader, l’un des leaders de la contestation, est professeur pour des élèves de 7 à 12 ans. Il nous accueille chez lui, avec son costume marron et sa cravate violette : « Nous n’irons plus faire cours pour faire pression sur le gouvernement jusqu’à ce que nous soyons payés ».
Les autorités intimident les professeurs
Au fur et à mesure, les manifestations s’élargissent. Des rassemblements ont lieu dans plusieurs villes. Aujourd’hui, c’est 10 000 professeurs qui participent tous dimanches aux protestations. La semaine dernière, Sadeq a été arrêté par les services secrets kurdes : « Ils m’ont retenu pendant neuf heures avec douze autres professeurs. Ils nous ont mis la pression pour qu’on arrête… Les services secrets ont déjà brulé des voitures d’autres professeurs. Parfois, je dors chez mes parents avec ma famille parce que j’ai trop peur de passer la nuit chez moi. »
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« J’espère que l’école rouvrira bientôt, mais là, l’année est foutue ». Drwa est la mère de trois enfants de 3, 13 et 15 ans. Depuis le mois de septembre 2023, aucun ne va à l’école. Ils passent leurs journées à jouer au football dans le salon ou aux jeux vidéos. « Bien sûr, je n’aurais jamais imaginé que l’école ferme aussi longtemps, déplore la mère de famille. Je pensais que ça allait durer maximum deux semaines. Je n’ai jamais vu ça. »
« Nos rêves risquent de s'effondrer »
Rodan, un jeune qui ne peut plus aller en cours, s'inquiète de la situation : « J’ai un mauvais pressentiment. On manque les cours depuis trop longtemps, ce n’est pas bon… C’est la seule éducation qu’on ait. Si ça continue comme ça, nos rêves risquent de s’effondrer ». Et quand on lui demande ce qu'il veut faire comme métier, Rodan répond : « Docteur ».
Le gouvernement a récemment menacé les professeurs grévistes de les renvoyer s'ils ne reprenaient pas les cours avant la fin du mois.
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