Série «Dis-moi à quoi tu joues»: le Ngbaba en Centrafrique, «un jeu pour développer une forme de solidarité»
Publié le :
« Dis-moi à quel jeu tu joues, je te dirai qui tu es ». C'est une série spéciale de RFI à la découverte des jeux populaires à travers le monde, ces jeux qui, à travers les joueurs, parlent de la culture et de l'identité de chaque pays. Aujourd'hui, direction la Centrafrique, à la découverte du Ngbaba, un sport traditionnel très pratiqué dans le pays. Le Ngbaba en langue locale Sango est un mélange de golf, du tennis ou encore de baseball. Il se joue avec deux équipes qui s'affrontent sur un terrain plat en frappant un palet en caoutchouc avec des bâtons pour marquer le but. Aujourd'hui, il n'existe pas de fédération de Ngbaba en Centrafrique et ce jeu se pratique de manière artisanale avec des joueurs capables de transformer des objets recyclés ou des matériaux du quotidien pour pratiquer ce sport traditionnel. Reportage de Rolf Steve Domia-leu.

Après avoir recyclé des objets dans les quartiers, un groupe de joueurs de Ngbaba se rassemblent à l'ombre d'un teck sur le terrain de l'université de Bangui. Avec application, chacun fabrique ses propres équipements à base d’objets collectés : babouches, bâtons, caoutchoucs et même de la farine de manioc pour délimiter le terrain. Bernardine Terrach est à pied d’œuvre : « On n'a pas besoin de déployer beaucoup d'efforts pour avoir les équipements. Il suffit seulement de couper les branches d'arbres. On utilise un couteau ou une machette pour découper les branches. On peut même ramasser les bâtons par terre lorsqu'ils traînent. Il n'y a pas de bâtons spécifiques pour pouvoir jouer le Ngbaba avec. Il suffit de choisir les branches d'arbres qui sont solides. Nous fabriquons le palet à base des tapettes qu'on peut recycler, découper en rondelles. »
Aujourd'hui, le Ngbaba est un sport traditionnel uniquement pratiqué en Centrafrique. Sonek Langaté est organisateur de tournois. Grâce à ses recherches auprès d’historiens et de sociologues, il a compris l'essence du jeu : « Ce jeu était à l'époque un rite d'initiation avec des valeurs de l'inclusivité et de solidarité. Lorsqu'on lance le palet, on ne sait pas qui viendra jouer. Il suffit d'avoir ton bâton, tu rentres et tu joues avec tout le monde. À l'époque, ces rites consistaient à mettre les gens ensemble, pour pouvoir développer une forme de solidarité mécanique dans notre société. »
Avoir une fédération de Ngbaba
Le Ngbaba est un jeu très physique qui nécessite aussi de la concentration et de l'intelligence. Debout à côté du terrain, David Louisant, l'un des joueurs, se prépare à faire son entrée : « C'est un jeu qui se pratique sur un terrain, un peu comme le football. Sauf qu'on ne le joue pas sur des gazons. Il faut un terrain en terre battue. On divise le terrain en deux, séparé par une ligne blanche. Et chaque équipe doit défendre son côté. Lorsqu'on lance le Ngbaba, ou le palet, tu dois tout faire pour que ça ne tombe pas dans ton camp. Tu dois faire de ton mieux pour le ramener dans le Camp adverse. Si ça tombe de ton côté, ça veut dire qu'on t'a marqué d'un point. »
À chaque mouvement, course et frappe, la poussière envahit les lieux. À défaut d'une fédération, chaque arrondissement de Bangui dispose d'une association qui organise des rencontres inter-quartiers. Pour Sonek Langaté, il est temps de professionnaliser ce jeu : « On espère que nous aurons la fédération de Ngbaba cette année. Le vœu pieux que nous avons, c'est de faire en sorte que le Ngbaba soit considéré comme une discipline sportive à part entière pour essayer de pérenniser notre culture et traditions. C'est très important en termes de survie de notre culture. »
Selon les historiens, le Ngbaba existait déjà à l'époque de l'Oubangui Chari, avant l'indépendance en 1960. Peut-il s’exporter à l’international ? Aujourd'hui, c’est le rêve de tous les joueurs.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne