
Un président en fuite qui crie au coup d’État, un colonel propulsé chef de l’État à la tête d’un Conseil de défense nationale de transition (le CNDT), la Constitution suspendue, ainsi que plusieurs institutions clés. Seule l’Assemblée nationale a été maintenue. « Ce changement brutal suscite autant d’inquiétudes que d’espoirs, constate Midi Madagascar. Une nouvelle page de l’histoire politique de Madagascar s’ouvre. L’avenir dira si elle mènera enfin à la stabilité tant attendue. »
En effet, pour l’instant, on est en plein « embrouillamini », pour reprendre le terme utilisé par Aujourd’hui au Burkina Faso. Et « pas évident que la solution réside dans un pouvoir kaki », pointe le quotidien burkinabé qui sait de quoi il parle.
La GenZ dépossédée de son combat ?
On en est donc au stade des questions. Madagascar Tribune s’interroge : « Comme d’habitude, cette nouvelle transition ne va-t-elle pas servir de gigantesque machine à laver pour procéder au blanchiment de casseroles et de parcours peu reluisants ? Quels sont les points communs avec les coups d’État militaires du Sahel ? Faut-il mettre sur le compte du hasard que quelques drapeaux russes soient apparus lors des manifestations de mercredi dernier ?
« Il semble que la GenZ ait juste servi de marchepied, soupire Madagascar Tribune, et se soit fait déposséder de son combat. Pas nécessairement au niveau de la distribution de chaises, car elle n’en a jamais fait un objectif, mais plutôt dans les valeurs pour lesquelles elle a combattu. Il n’est pas évident, poursuit Madagascar Tribune, que la nouvelle nomenklatura (…) ait le profil parfait pour répondre aux aspirations des jeunes à la démocratie, à la bonne gouvernance, au respect de l’État de Droit et à la lutte contre la corruption.
Certes, il faut les voir à l’œuvre avant de les juger. Mais sans vouloir citer de noms, beaucoup de ceux qui s’activent actuellement sur les podiums ou en coulisses (…) sont entièrement solidaires du parcours calamiteux de notre pays (…). »
Petits arrangements ?
L’Express, autre quotidien malgache, déplore en effet l’attitude de certains parlementaires : « Les politiciens sont en train de saborder la transition, affirme le journal, alors qu’il n’y a que le Capsat et la GenZ qui peuvent revendiquer la victoire. Des députés se sont “arrangés“ avec les militaires pour mettre en place un nouveau bureau permanent, des vice-présidents et exiger des avantages faramineux pour voter le budget à la prochaine session. Autrement dit, on reprend les mêmes et on recommence, s’exclame L’Express. Des mesures de précaution auraient dû être prises par le pouvoir de transition. (…) Alors qu’aucune structure politique n’est en place, qu’on ignore qui fait quoi, il y a des individus qui se croient influents et se permettent des prérogatives accordées nulle part. Si le CNDT n’arrive pas à neutraliser ces personnages, sa tâche sera ardue. »
Deux ans de transition et après ?
La situation politique à Madagascar est donc compliquée, voire confuse. Jeune Afrique s’interroge : « Combien de temps la transition va-t-elle durer ? Quand l’ordre constitutionnel sera-t-il rétabli ? Quelle sera la date des élections qui permettront aux Malgaches de voter pour leur président ? Devant le palais d’État, le colonel Randrianirina a annoncé une transition de “deux ans maximum“ sans que, pour l’heure, rien ne soit inscrit dans le marbre. Selon nos informations, une charte de la transition est en cours de rédaction et devrait être rendue publique dans les prochains jours, poursuit le site panafricain. Elle devrait contenir la durée de la transition avant de prochaines élections, la composition exacte du CNDT et la répartition des portefeuilles ministériels du futur gouvernement. »
Quid des financements internationaux ?
Et puis, autre point essentiel, souligne Jeune Afrique : « le nouveau pouvoir va également devoir convaincre les institutions internationales, de la Banque mondiale au FMI, de ne pas suspendre les financements indispensables au bon fonctionnement du pays. (…) C’est là une des principales urgences pour le colonel Randrianirina et ses hommes. Une suspension des financements serait une catastrophe pour l’État et pour les populations dont la survie en dépend largement, pointe le site panafricain. Selon plusieurs observateurs de la scène politique et entrepreneurs malgaches, si cette manne se tarissait brutalement, ce serait la porte ouverte aux mafias, qui pourraient proposer de soulager financièrement l’État en échange d’avantages exorbitants. C’est ce qui s’était passé en 2009 pour Rajoelina. »
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