À la Une: Barkhane, un bilan en demi-teinte…
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De nombreux journaux reviennent ce mercredi matin sur le départ lundi des derniers soldats français de l’opération Barkhane au Mali et dressent le bilan de ces neuf années de présence militaire, d’abord encensée puis conspuée.
Pour La Croix, c’est clair : le bilan est « médiocre : en 9 ans de présence, le contingent français n’a pas éradiqué le terrorisme ni stabilisé le pays, relève le quotidien catholique. La situation est même pire pour la population. Et Paris a été évincé de son statut de grand partenaire par les officiers putschistes au pouvoir, qui lui préfèrent Moscou. La France a fait preuve d’un excès de confiance, poursuit La Croix, dans sa capacité à enrayer la crise profonde et durable que traverse le Mali. Pour faire court : on n’éteint pas un incendie avec un verre d’eau. Les défis étaient trop vastes. Concentrés sur leur mission de combat, les 5000 hommes de Barkhane ne pouvaient pas apporter de réponse aux fortes tensions économiques, sociales, climatiques, ethniques qui fragmentent la société ».
Toutefois, tempère La Croix, « cet échec ne doit pas conduire à abandonner le peuple malien, lié à la France par d’innombrables attaches familiales et culturelles. Les solutions aux difficultés qu’il affronte exigent de l’endurance, de la solidarité, des coopérations transnationales, un renforcement du soutien de la communauté internationale. Les autorités actuelles s’enfoncent certes dans une logique d’isolement. Mais il faut déjà préparer, avec les pays de la région, le moment où elles voudront sortir de l’impasse, ou devront céder la place ».
Trou noir…
Pour Le Figaro, le bilan de Barkhane n’est pas non plus très reluisant… « La France a marqué des points ponctuels, sécurisant temporairement diverses portions de l’immense Mali et éliminant des chefs aussitôt remplacés. Mais elle n’a pas empêché la prolifération des djihadistes, deux coups d’État depuis 2020 et l’arrivée du groupe de mercenaires russes Wagner, qui a accéléré son éviction à coups de désinformation et de connivence commerciale avec une junte encouragée dans ses dérives. Ainsi, soupire Le Figaro, nous avons perdu 59 soldats et dépensé un milliard d’euros par an pour finalement laisser derrière nous un trou noir, où les mêmes périls – terrorisme et immigration – nous menacent plus que jamais. »
La chute de Bamako ?
« Un départ par la petite porte », s’exclame Sud-Ouest en première page. « La crise ouverte avec le Mali a au moins le mérite d’obliger Paris à réviser sa politique africaine. L’objectif d’aider les États de la zone à combattre le djihadisme armé reste valable. Mais force est de constater que l’interventionnisme du début, même tempéré par la création du G5 Sahel et le travail conjoint avec les armées locales, a échoué, estime Sud-Ouest. Ou n’a fait, en tout cas, que retarder la propagation du terrorisme. »
Et le journal de s’interroger : « un an après le retrait américain d’Afghanistan, qui a permis le retour des talibans à Kaboul, le départ français du Mali préfigure-t-il la chute de Bamako ? On verra si le régime des colonels maliens, durement secoué par les assauts djihadistes malgré l’appui de ses nouveaux alliés russes de la milice Wagner, saura l’empêcher ».
Wagner désormais en première ligne…
Justement, « que font les mercenaires russes de Wagner au Mali ? », s’interroge Le Parisien. « Bamako dément leur présence, évoquant seulement des "instructeurs" venus de Russie pour soutenir son armée. Tandis que Moscou parle d’un contrat "commercial" entre Wagner et le Mali qui ne concernerait pas la Russie. Combien sont-ils ? Aucun chiffre officiel ne peut être avancé. Emmanuel Macron a toutefois évoqué, en février dernier, la présence d’environ 800 mercenaires, venus "avec des finalités prédatrices", avait-il dit. »
Quels sont leurs missions ? « Généralement, dès que les soldats français quittent une base, Wagner les remplace dans la foulée avec les FAMa, les Forces armées maliennes », indique au Parisien Mathieu Pellerin, analyste Sahel pour l’International Crisis Group. « L’armée malienne a en effet intensifié ses opérations anti-djihadistes depuis quelques mois en s’appuyant sur Wagner. Lors de ces affrontements, les mercenaires russes sont en première ligne. Ils se battent quotidiennement aux côtés des FAMa », observe le chercheur, qui reconnaît que la présence des paramilitaires a permis « une remobilisation de l’armée malienne ».
Toutefois, précise Le Parisien, « cette présence armée accrue n’a pas permis d’améliorer le contexte sécuritaire. Déjà épicentre du conflit au Sahel depuis 2012, le Mali a vu la guerre s’intensifier et l’expansion djihadiste s’accélérer. Les attaques se sont multipliées jusqu’au sud ces derniers mois, y compris aux abords de Bamako. Et les opérations de Wagner ne sont pas toujours couronnées de succès. Pire, le groupe est accusé de nombreuses exactions sur des civils ».
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