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À la Une: quel avenir pour Haïti?

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Des véhicules armés de la police contrôlent le périmètre d'un commissariat de police incendié par des gangs armés, à Port-au-Prince, le 6 mars 2024.
Des véhicules armés de la police contrôlent le périmètre d'un commissariat de police incendié par des gangs armés, à Port-au-Prince, le 6 mars 2024. © AFP/Clarens Siffroy
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« Neuf heures du matin hier [mardi 12 mars, NDLR], le soleil brille sur l’avenue John-Brown de Port-au-Prince, relate le correspondant de Libération en Haïti. Des bus et quelques voitures privées circulent à belle allure. Calme apparent. La veille, dans la soirée, le Premier ministre haïtien, Ariel Henry, a tiré sa révérence sous la pression des chefs d’État membres de la Communauté caribéenne. »

Et, pointe encore Libération, sous la pression des « gangs armés qui ont pris le contrôle de pans entiers de ce pays de 11 millions et demi d’habitants. Des affrontements les opposent régulièrement aux forces de l’ordre, et ils s’en sont récemment pris à des sites stratégiques comme le palais présidentiel, des commissariats et des prisons. La semaine dernière, le puissant chef de gang, Jimmy Chérizier alias "Barbecue", avait menacé d’une "guerre civile" si Ariel Henry ne démissionnait pas. Les assauts contre les institutions ont cessé hier, mais des tirs se faisaient encore entendre dans certains quartiers ».

Une tâche colossale

Alors quelle va être la suite ? « Aujourd’hui, on peut s’interroger sur les échecs cuisants essuyés par cette chose informe qu’est la communauté internationale, soupire Le Temps à Genève. Plusieurs missions des Nations unies n’ont pas réussi à infléchir la trajectoire de cet État parmi les plus pauvres de la planète. (…) Les ONG internationales, sans doute animées de bonnes intentions, ne présentent pas un meilleur bilan. (…) Confrontée à une forte vague migratoire haïtienne dans les années 1990, l’administration américaine de Bill Clinton avait tenté de "restaurer la démocratie". L’espoir fit long feu. »

Alors, « au-delà de ce constat d’impuissance, que faire ?, s’interroge Le Temps. Si l’ingérence de type colonial est d’emblée vouée à l’échec, Haïti ne peut être abandonné à son sort d’État en apparence damné. Mais l’aide extérieure ne sera utile que si elle sert à créer les conditions nécessaires aux acteurs locaux pour reconstruire un pays en lambeaux. La tâche promet d’être colossale ».

Inciter les dirigeants haïtiens à travailler ensemble

« Imaginer un nouvel avenir pour Haïti est la tâche des Haïtiens, renchérit le New York Times, mais cela nécessitera un acte de foi et beaucoup d’aide, financière et autre. Les États-Unis et leurs alliés dans la région doivent abandonner leurs jeux paternalistes en Haïti. Mais ils peuvent et doivent aider à accoucher d’un nouvel Haïti en réunissant, en soutenant et en incitant les dirigeants haïtiens à travailler ensemble à la construction d’un nouvel avenir. Ce moment, aussi délicat soit-il, offre une chance aux espoirs haïtiens de triompher de la peur. Nous ne pouvons pas ne pas la saisir. »

Pour Frantz Voltaire, directeur du Centre international de documentation et d’information haïtienne, caribéenne et afro-canadienne, situé à Montréal, interrogé par Le Devoir, le départ d’Ariel Henry est « un petit pas ». Mais, même s’il y a urgence de sortir le pays du cycle infernal de la violence, « cela prendra un certain temps, affirme-t-il. Dans l’immédiat, la démission d’Ariel Henry pourrait calmer le jeu, tout dépend de la réaction des gangs et des autres acteurs ».

Ne pas composer avec les groupes armés

En tout cas, « pour assurer l’avenir du pays, on ne peut pas négocier avec les groupes armés ». C’est ce qu’affirme le sociologue Louis Wilsot dans les colonnes de Libération. « On ne peut pas oublier, dit-il, les assassinats, les massacres, les famines et les familles déplacées. La justice doit agir, ensuite viendra le temps de la réinsertion et du pardon. Composer avec les gangs est impossible, ils doivent payer les conséquences. (…) La seule solution, poursuit Louis Wilsot, est de laisser les Haïtiens lancer et gérer leurs propres initiatives. Il y a des personnalités écoutées et respectées, à l’intérieur et hors du pays, qui ne sont pas suspectes de corruption. (…) Sur 11 millions d’habitants, il y a bien sûr des dirigeants potentiels dignes de confiance. (…) Le départ d’Ariel Henry est un pas en avant d’un point de vue politique, si les acteurs en présence parviennent à trouver un accord pour réorganiser le pays. »

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