Présidentielle 2022: pourquoi certains Français font le choix de l'abstention?

L'abstention sera-t-elle la grande gagnante de la course à l'Élysée ? À en croire les instituts de sondage, elle pourrait atteindre quelque 30 %, un record pour un premier tour de présidentielle sous la Ve République. Pourquoi s'abstenir de voter ? Qui sont ceux qui font ce choix ? Alexis Bédu, journaliste à RFI, a sillonné plusieurs régions à la rencontre de Français qui ont décidé de ne pas glisser leurs bulletins dans l'urne. 

Affiches de campagne officielles endommagées et déchirées des candidats à l'élection présidentielle de 2022 en France. © Chesnot/Getty Images

« L'abstention est un sujet qui revient très souvent, mais au-delà, il y a surtout un côté ras-le-bol et j'ai senti quelque chose de très particulier sur le terrain ces derniers mois », explique Alexis Bédu dans cet épisode de Témoins d'actu. 

Ce qu'il retient particulièrement, des personnes qu'il a rencontrées notamment dans les petites villes, c'est qu'elles se sentent abandonnées : « La décentralisation n'a jamais eu lieu dans ces territoires. Je prends l'exemple du village de Paudy, dans l'Indre. Quasiment tous les commerces ont fermé, il n'y a plus qu'une petite épicerie tenue par une dame de 84 ans. Quand elle va s'arrêter de travailler, il n'y aura plus rien. Les dotations de l'État ont baissé de plus de 50 000 euros ces dernières années. Le maire est totalement abattu et les habitants ont un vrai sentiment d'abandon ».

La tonalité semble la même dans les banlieues. Alexis s'est rendu à Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis. « Les gens veulent vivre normalement, mais ils sont pris à la gorge. Beaucoup m'ont dit qu'ils voulaient travailler, mais ils ne trouvent pas. S'ajoutent le mal-logement, le sentiment d'insécurité pour certains, le sentiment d'État policier pour d'autres et tout cela mène à l'abstention ».

« Pourtant, poursuit Alexis, ils s'intéressent énormément à la vie politique du pays. Mais tous les débats, chaque jour, sur le voile, sur l'Islam, sur l'insécurité, cette image renvoyée de la banlieue, cela pousse certains à se replier, à ne plus croire en rien ».

Alexis Bédu a rencontré plusieurs générations, mais, dit-il « chez les jeunes, l'abstention est très présente. Il y a toujours cette volonté de plus de démocratie, de donner le pouvoir au peuple et paradoxalement de ne pas aller voter pour ne pas cautionner ce qui est mis en place ». 

« L'abstention, conclut Alexis, revêt un profil très pluriel, mais ce qui est certain, c'est qu'un fossé est en train de se creuser et il est de plus en plus profond entre différentes populations de la société française ».

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