Afghanistan: le projet faramineux de construction du canal Qosh Tepa
Publié le :
En Afghanistan, la deuxième phase de travaux du projet de canal Qosh Tepa a démarré le 16 mars, dans la province de Jowzjan dans le nord de l’Afghanistan. Il est le plus grand canal d'irrigation d'Afghanistan. Un projet porté par le régime taliban depuis qu’il a pris le pouvoir en août 2021 et qui suscite la colère des voisins d’Asie centrale.

De notre correspondante à Islamabad,
Qosh Tepa est un long canal de 280 kilomètres de long, de 100 mètres de large, d’une profondeur de huit mètres. Il commence dans la province de Balkh, traverse la province de Jawzjan et ensuite, celle de Faryab. Tout ce territoire se trouve dans le nord de l’Afghanistan.
Ce canal est construit sur le fleuve Amou-Daria qui sert de frontière naturelle entre l’Afghanistan et le Tadjikistan mais aussi entre l’Ouzbékistan et le Turkménistan. C’est d’ailleurs au Turkménistan qu’il y a un canal construit sur le fleuve Amou-Daria. Le canal du Karakoum, long de 1 375 km, est le plus grand canal d’irrigation au monde.
Après avoir pris le pouvoir en 2021, les talibans ont lancé la construction du canal Qosh Tepa, du côté afghan. C'est un projet qui doit durer cinq ans et dont le cout est estimé à soixante milliards d'afghanis, soit près de 775 millions d’euros.
Chantier depuis 2022
C’est l’un des plus grands projets de l’histoire de l’Afghanistan sur le plan économique. Il n’a pas été réalisé avant l’arrivée des talibans parce que toute la partie nord de l’Afghanistan a toujours fait face à des problèmes sécuritaires. Il y avait une forte présence talibane à l’époque de la république d’Afghanistan. Pendant un temps, c’était même devenu un fief du groupe État islamique où les combats étaient récurrents. Les talibans étant au pouvoir, leur insurrection terminée, le champ est libre pour tous ces projets qui demandent une bonne sécurité. Le chantier a commencé en 2022.
Il y a du travail pour la population, alors que l’Afghanistan est confronté à un taux de chômage important qui s’est accentué avec la prise du pouvoir par les talibans. Ce canal est une aubaine pour les agriculteurs de toute la région qui souffre depuis des années de sécheresse, et qui ne cesse de s’aggraver avec le changement climatique. Une fois terminé, ce canal devrait permettre par exemple l’irrigation de près de 300 000 hectares de terres agricoles rien que dans la province de jopwzjan.
Des experts agricoles afghans disent même que l'Afghanistan deviendrait autosuffisant en matière de production de blé et de céréales, et espère même pouvoir en exporter.
Inquiétudes
Ce projet inquiète énormément les pays voisins qui partagent l’eau de ce fleuve et il est aussi au cœur de tensions régionales, parce que l’eau du fleuve va diminuer et il y en aura moins pour les pays voisins qui l’utilisent.
La Banque eurasiatique de développement a récemment déclaré lors d’une réunion des chefs de gouvernement des pays de la Communauté des États indépendants (CEI) qui regroupe neuf anciennes républiques soviétiques, que les problèmes de pénurie d'eau dans les pays d'Asie centrale s'aggraveraient à cause de la construction du canal de Qosh Tepa en Afghanistan. Ils craignent un gaspillage d'eau.
L’inquiétude vient du fait que la région d'Asie centrale connaît des pénuries d'eau chroniques. Selon des études réalisées par des experts chinois, il s’agit pour beaucoup d’une mauvaise gestion de l’eau. Le Tadjikistan en utilise énormément pour ses élevages de volailles, l'Ouzbékistan pour l'élevage, le Turkménistan pour le coton qui en demande énormément. L’ONU parle même d’une utilisation irrationnelle de l'eau en Asie centrale.
Les répercussions économiques de la construction du canal Qosh Tepa se feront sentir chez les voisins de l’Afghanistan. Il entraînerait, selon certains médias, une diminution du débit du fleuve Amu, ce qui aiderait certes les agriculteurs afghans mais nuirait par ailleurs à l'industrie du coton en Ouzbékistan en raison du volume d’eau disponible qui baissera.
On sait que la sécurité dans la région est très fragile. Des tensions sur un sujet aussi précieux que l’eau font craindre que la situation ne dégénère un jour en conflit.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne