Thaïlande: une députée du parti «Move Forward» condamnée pour lèse-majesté
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C'est un nouveau coup dur pour l’opposition pro-démocratie en Thaïlande. Un tribunal de Bangkok a condamné, mercredi, une députée du mouvement progressiste Move Forward à six ans de prison – elle est accusée d’avoir insulté la monarchie, dans des messages postés sur X l’ancien Twitter, jugés diffamatoires à l’égard du roi.

Les médias thaïlandais l’appellent parfois « giant killer », la « tueuse de géants », parce qu’en mai dernier aux législatives, Rukchanok Srinork avait fait carton plein : à la surprise générale, elle avait chassé de son siège de député le fils d’un poids lourd du puissant parti Pheu Thai. Sur sa bicyclette, un mégaphone en bandoulière, la jeune militante avait arpenté les rues du quartier Bang Bon de Bangkok pour son parti Move Forward — ce parti pro-démocratie qui a ensuite gagné les élections, mais n’a finalement pas pu accéder au pouvoir, bloqué par des sénateurs appartenant à l’élite militaro-monarchiste.
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Une législation très protectrice pour la famille royale
Aujourd’hui élue députée, Rukchanok Srinork est donc rattrapée par une législation très stricte censée protéger la famille royale. Une législation contre laquelle cette femme politique de 29 ans avait justement protesté en 2020, lors des grandes manifestations en faveur de réformes démocratiques, et notamment celle de l’article 112, qui punit d’une peine allant jusqu’à quinze ans d'emprisonnement le crime de lèse-majesté. Ce même article vaut donc aujourd’hui une condamnation à la prison à Rukchanok Srirnok. Elle a été remise en liberté sous caution et compte faire appel.
Son crime est d’avoir posté deux messages sur Twitter, en 2021. Dans l’un de ces messages, elle a critiqué l’implication d’une entreprise du roi Vajiralongkorn dans la fabrication de vaccins anti-Covid. Ce que le tribunal considère comme diffamatoire à l’égard de la famille royale. Dans un autre message, Rukchanok aurait cité une phrase anti-royaliste du philosophe français du 18ᵉ siècle Denis Diderot. Difficile d’en savoir plus, puisque les procès pour lèse-majesté se déroulent derrière des portes closes.
Rukchanok Srinork n’est pas la seule à être visée par cette loi de lèse-majesté. Depuis 2020, au moins 260 personnes ont été inculpées pour avoir insulté la monarchie. L’affaire de la députée est d’ailleurs la première d'une série de procédures contre son parti Move Forward et son ex-dirigeant Pita – le grand gagnant des élections de mai dernier. Difficile de ne pas y voir un acharnement destiné à faire taire l’opposition une fois pour toutes.
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