Mer de Chine: Pékin prête à faire le blocus de Scarborough
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Avec l’arrivée d’un convoi civil de bateaux philippins sur le récif de Scarborough, la tension monte en mer de Chine méridionale. Ces hauts-fonds sont très convoités et il y a du monde sur place. Les garde-côtes chinois sont prêts à faire le blocus de l’atoll.

De notre correspondant à Pékin,
Un ancien responsable de l’US Air Force parlait, ce lundi 13 mai, de l’envoi d’une véritable armada chinoise venue bloquer Scarborough, au moins quatre bateaux des garde-côtes chinois et 26 grands navires de la milice maritime. « Ce sera de loin le plus grand blocus que j'ai jamais observé à Scarborough, disait Ray Powell. La Chine semblant déterminée à faire valoir agressivement ses revendications sur les hauts-fonds, dont elle a pris le contrôle en 2012. » Alors, évidemment, ce n’est pas comme cela que les médias d’État chinois présentent les choses. On a eu droit à un programme de « sauvetage et découverte » sur la télévision centrale de Chine, avec une vidéo envoyée par les garde-côtes chinois.
Voilà, les ordres de la capitainerie sur fond de grosse musique pour la bande-son, alors qu’à l’image se déroule une opération de sauvetage. Un homme est tombé à la mer, les garde-côtes vont le chercher et font un massage cardiaque sur un mannequin sur le pont du bateau. La Chine « normalise » les exercices pour assurer la sécurité des bateaux de pêche chinois dans la région, disent les médias officiels.
Le même jour, on a eu droit à un mini-documentaire avec de belles images aériennes de cet atoll en triangle situé à 220 kilomètres de l’île philippines de Luçon. « Au début de l'été, la mer de Chine méridionale offre de magnifiques paysages, dit le commentaire. La magnifique île de Huangyan [c’est le nom chinois de Scarborough] présente des paysages différents avec le flux et le reflux de la marée. » Le récif fait partie de la zone économique exclusive (ZEE) des Philippines, mais la Chine y a planté son drapeau en 2012.
Et depuis 2020, la Chine empêche les navires philippins d’approcher à coups de canon à eau. Des images qui contrastent avec une vidéo publiée ce mardi matin, vue du ciel là encore et sur tous les comptes sociaux des médias d’État qui présentent des pêcheurs philippins rejetant leurs déchets dans les eaux bleues du lagon.
Opération « normalisée »
Il y a eu une décision du tribunal international de La Haye en juillet 2016, qui reconnaît aux Philippines des droits souverains sur une zone exclusive de 200 miles nautiques, mais Pékin n’en a cure et occupe Scarborough de facto – ses deux îles et les 150 km2 de lagon. Et les gros titres de la presse chinoise sont intéressants au sens où ils posent à nouveau cette revendication exclusive de Pékin. C’est la première fois que l’armée chinoise revendique une opération « normalisée » autour du récif de Scarborough, et c’est la première fois qu’on a dans les médias chinois une vue aérienne des hauts-fonds.
La dernière fois, c’était une simple photo prise depuis un bombardier de l’Armée populaire de libération qui avait survolé la zone. C’était en 2016, l’année où le tribunal de La Haye a affirmé que la Chine avait violé les droits de pêche traditionnels des Philippines autour de l’atoll. Ensemble, ces images confirment, en tout cas, l’existence d’une présence militaire chinoise sur place.
Montée des tensions
Les civils philippins ne comptent pas rebrousser chemin. C’est même le contraire, les responsables de la coalition Atin Ito disent qu’ils poursuivront du 14 au 17 mai ce qu’ils appellent « une mission de ravitaillement en mer de Chine méridionale », qualifiée par Manille de « mer des Philippines occidentales ». Il s’agit d’un « exercice légitime du droit des citoyens philippins à se déplacer sur leur propre territoire. Notre mission est pacifique, fondée sur le droit international et visant à affirmer nos droits souverains », ont fait savoir les leaders de la coalition.
Cent navires devaient participer à cette deuxième expédition civile qui vise à organiser une « course de bateaux pour la paix et l’unité » et à installer des balises et des bouées sur les hauts-fonds. Ce qui risque de faire des vagues, Pékin ne laissera probablement pas faire. Les tensions n’ont cessé de croître ces dernières semaines. Ce potentiel nouveau bras de fer intervient après les manœuvres XXL États-Unis/ Philippines la semaine dernière et alors que la Chine revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, point de passage de près de 2 800 milliards d’euros du commerce maritime annuel, avec Scarborough comme poste stratégique avancé pour l’Armée populaire de libération.
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