Afropian et la beauté des connexions humaines d’Hortense M’Bea
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Aujourd’hui modes africaines avec Hortense M’Bea et Afropian. Camerounaise de nationalité et citoyenne du monde Hortense M’Bea a choisi l’Ethiopie comme deuxième maison. Elle exerce deux métiers celui d’interprète et celui de créatrice de mode. Afropian est une marque panafricaine qui dispose d’un réseau d’artisans et d’artistes issus de 15 pays africains différents. Tisserands ou bronziers, Hortense M’Bea fonctionne au coup de cœur, aux rencontres afin de créer ses collections.

Celles-ci sont réalisées artisanalement, éthiquement avec des matières naturelles et des procédés ancestraux et racontent des histoires africaines presque oubliées.
La création, pour moi, c'est une espèce d'exutoire. Et puis, j'estime que j'ai aussi des choses à dire, j'ai des histoires à raconter, que maintenant je suis vraiment investie et sur ma lancée, je ne me vois pas du tout arrêter. C'est essentiel pour moi, cela me nourrit énormément aussi. J'ai toujours un petit carnet, des crayons pour dessiner, je prends des photos de choses en me disant peut être qu'un jour je vais en faire quelque chose. Je suis vraiment dans la création, constamment.
Hortense M’Bea, fondatrice d’Afropian, Maison de couture d’Addis-Abeba en Ethiopie
Afropian, cela vient d’afro-éthiopien parce qu'une chose qui m'a beaucoup choquée la première fois que je suis allée en Ethiopie en 1999, les Ethiopiens m'appelaient l'Africaine et eux se disaient non-africains, ils se disent Abyssins et c'est aussi lié au fait qu'ils n'ont pas été colonisés. Ils se distinguent du reste de l'Afrique, ils descendent de la Reine de Saba et du Roi Salomon. Quand je suis rentrée en Ethiopie, je voulais montrer aux Ethiopiens que nous nous connectons très bien et que les Ethiopiens peuvent être connectés au reste de l'Afrique. Je voulais être une passerelle parce qu'il y avait une déconnexion entre les deux, donc Afropian : c'est afro éthiopien.

Hortense M’Bea est née à Washington aux États-Unis dans une famille de diplomates. Camerounaise de nationalité, elle grandit essentiellement en Europe et aux États-Unis. Très amoureuse et inspirée par l’Afrique, à la fin de ses études d’interprétariat, elle élit domicile en Ethiopie. Elle exerce auprès d’organismes qui œuvrent au développement du continent africain en tant qu’interprète. En 2002 pour l’Union Africaine, ensuite pour les Nations Unies et enfin pour la banque africaine de développement. En 2017, elle quitte la banque africaine de développement et Abidjan et rentre avec sa marque Afropian, en Éthiopie.Hortense M’Bea conçoit Afropian comme une lettre d’amour à l’Afrique. « Mon but, c'est de valoriser toute cette excellence, cet artisanat, cette histoire qu'on oublie un peu. Je travaille beaucoup avec le batik, le bogolan, le tissé éthiopien. J'ai beaucoup de chance d'être en Éthiopie, où le coton est extraordinaire. Il y a une culture millénaire du tissage. C'est un vrai brassage, je ne choisis pas, c'est des coups de cœur, beaucoup de voyages, des rencontres qui me poussent vers des inspirations, des histoires qu'on me raconte, qui me porte vers une collection, comme la dernière que je viens de faire, que j'ai présentée au Fimo s'appelle Bamoun. Le mariage de Penboura.»

« J'ai une sœur qui s'appelle Penboura. Je ne veux pas l'appeler demi sœur parce que nous avons grandi ensemble. C'est la fille de ma mère et du côté de son père, elle fait partie de la famille royale Bamoun à Foumban, mais elle a grandi avec nous, donc elle s'est mariée dans notre culture qui est un peu différente. J'ai essayé d'imaginer ce que cela aurait été si elle s'était mariée dans la culture de son père, donc au Palais Royal Bamoun, avec tout le cérémonial. Ce sont des histoires qui me touchent, des coups de cœur comme cela. C'est de là que viennent les collections. »
Pour sa marque panafricaine, 100 %, artisanale en Afrique, Hortense M’Bea sélectionne des matières naturelles et des moyens de production éthique. Pour Afropianl’exigence d’éco responsabilité est naturelle. « Je viens d'une culture du bord de la mer au Cameroun. Je viens de Kribi où, à l'origine, nous sommes animistes. Nous voyons Dieu dans tout ce qui est nature, dans les rochers, certaines grottes, les arbres, l'océan. Nous respectons cet environnement. C'est comme de respecter sa mère. Il y a cette éco-responsabilité innée, naturelle. Mais je vais aussi plus loin dans la mesure où je réutilise, je recycle toutes mes chutes. Je ne jette absolument rien, j'ai des ballots de tissus mais que j'utilise pour faire des bijoux, des sets de table, etc. Je travaille avec des artisans qui sont certifiés bio au Mali.»

« Par exemple, ceux qui me font mon Bogolan sont certifiés bio. J'ai rencontré chacun des artisans avec lesquels je travaille, donc, je vois le processus, je vois qu'il ne pollue pas, je vois quel genre de teintures ils utilisent. C'est de la teinture naturelle. Il n'y a pas de teinture chimique dans ce que je fais. Le coton éthiopien que j'utilise, c'est du coton bio. Je travaille en Éthiopie, avec deux coopératives qui cultivent leur propre coton, le filent, le tissent et le teignent. Il y a une traçabilité. Nous savons ce que nous utilisons, d'où ça vient. Les gens ne se rendent pas compte, mais en Afrique, nous avons beaucoup de chance d’'avoir accès à des produits naturels très facilement, surtout en Éthiopie.»
Hortense M’Bea souhaite inciter les Africains à consommer et valoriser ce qui est produit localement pour que l’excellence africaine continue. « Mes tisserands, mes bronziers depuis des années se plaignent du fait qu'ils n'arrivent pas à transmettre leur savoir. Eux vieillissent. Il n'y a pas de centre de formation, donc c'est un savoir qui quand ils seront partis, va se perdre. Il faudrait que les Africains investissent dans la formation, créent des centres de formation où ces artisans pourraient former les apprentis et qu'ils soient bien payés pour qu'ils soient intéressés. C'est un travail très pénible et en même temps mal payé. La valeur de nos artisans n’est pas reconnue alors qu'ailleurs en Europe, un artisan, un ébéniste va être très bien payé. C'est un art tellement rare. Les gens se rendent compte de la valeur mais les Africains, non ! »

« Il y a beaucoup de choses qui disparaissent, donc il y a tout un mouvement autour de la préservation du Ndop. Tous ces motifs qui sont utilisés sur le Ndop sont des motifs particuliers qui sont transmis de génération en génération d'un tisserand à un autre. Il y a des secrets de fabrication qui ne sont pas publics et qui, s'ils ne sont pas transmis, sont perdus. Maintenant le Ndop, c'est un petit groupe. Il y a un petit groupe de femmes au niveau du palais du sultan qui tisse le Ndop, ce n’est pas assez. Et je dis toujours que ce qui a été fait à la main, c'est un petit peu thérapeutique. Quand je porte un vêtement, il y a une femme dans un village au Mali qui a pris le temps de faire cela et maintenant c'est sur ma peau et je suis en Éthiopie. Il y a une femme qui va être à Madagascar, qui va porter mes vêtements. Il y en a une qui est à New-York qui porte cela. C'est un fil que nous avons tissé, qui nous connecte les uns avec les autres. »
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