Aujourd'hui l'économie

Le nationalisme vaccinal met-il en péril la production des vaccins ?

Publié le :

Les déboires du vaccin Astra Zeneca accentuent la pression sur les industriels. Les gouvernants se démènent pour obtenir les milliards de doses manquantes alors que les laboratoires ont du mal à répondre à cette avalanche de commandes.

Un vaccin AstraZeneca.
Un vaccin AstraZeneca. © Gent Shkullaku
Publicité

La rapidité avec laquelle plusieurs vaccins anti-Covid-19 ont été mis au point a émerveillé la terre entière. Ces prouesses scientifiques masquent les défis gigantesques de la production. Les laboratoires font alors miroiter la livraison de 800 millions de doses avant la fin de l’année 2020, au 31 décembre seulement 20 à 30 millions de doses sont disponibles. Fabriquer des vaccins à grande échelle est une tâche hors norme et complexe. Chez AstraZeneca on compare la chaine de production à un Rubik’s cube : il faut coordonner la production, la livraison des quelque 80 ingrédients et les différentes phases de fabrication. Résultat, comme pour les masques, il y a un an, l’approvisionnement relève aujourd’hui de la foire d’empoigne entre gouvernements.

Pour accélérer la cadence les laboratoires multiplient les alliances, est-ce que ça marche ?

Effectivement AstraZeneca a tout de suite travaillé avec le champion mondial de la production de vaccin, le Serum Institute of India. La plus grande usine de vaccin au monde. Mais il faut quand même du temps pour maîtriser la production de ce vaccin classique qui murît dans les cuves. Pfizer de son côté s’est allié avec les concurrents comme Sanofi entre autre. Les géants de la « pharma » savent faire, parce qu’ils sont habitués à jongler avec les contraintes pour maximiser les profits. Un vaccin fabriqué en Europe émane d’usines réparties sur 13 pays européens. Mais ces initiatives ne peuvent pas faire des miracles, quand les gouvernants bloquent la circulation des produits. Ce que font les États-Unis depuis le début et ce que fait maintenant l’Europe.

En réaction les pays en manque de vaccin veulent se doter de leurs propres capacités de production.

Le nationalisme vaccinal bat son plein. Plus d’une demi douzaines de pays se sont lancés dans des projets industriels avec l'aide financière des pouvoirs publics. C’est le cas de l’Australie, visée par le blocus italien, et très dépendante des importations pour couvrir ses besoins médicaux. Mais aussi du Brésil, ou de la Thaïlande. En Allemagne, un pays importateur net de vaccin, la Basse-Saxe se hâte de convertir un institut vaccinal centenaire en un site ultra moderne. Berlin veut produire d'ici un an deux milliards de doses. L’Union européenne fait des efforts pour amplifier la production au sein de ses frontières des ingrédients de plus en plus difficiles à se procurer. Comme les pochettes en plastique, les seringues adaptées à une meilleure récupération des vaccins contenus dans les flacons.

Ces initiatives locales sont-elles efficaces ?

Cela dépend de la taille des sites. Il faut au moins des unités capables de produire 100 millions de doses par an pour être performant. L’usine que le gouvernement canadien subventionne pour sortir 2 millions de doses par mois ne sera pas compétitive, mais Ottawa considère qu’elle n’a pas de vocation commerciale, c’est une unité d’appoint, tout comme il existe des centrales électriques d’appoint pour faire face aux pics de consommation. Jusqu'à maintenant le club des pays producteurs du vaccin anti-covid, ils sont 13, ont construit leur industrie sur des chaînes de valeur internes, ils dépendent les uns des autres pour les produits intermédiaires. Laisser ces relations commerciales prospérer ne réglera pas la question de la pénurie en un jour, mais ce sera plus efficace que les mesures protectionnistes ralentissant aujourd'hui la campagne mondiale de vaccination.

EN BREF

Au Liban la livre a connu hier une nouvelle chute record

Sur le marché noir, il faut désormais 15 000 livres pour obtenir un dollar. En un an et demi la monnaie libanaise a perdu 90% de sa valeur. Plus de la moitié de la population vit aujourd'hui en dessous du seuil de pauvreté.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes