Aujourd'hui l'économie

Pour l'Union européenne, le nucléaire et le gaz ont un rôle à jouer dans la transition énergétique

Publié le :

La décision a suscité sans surprise une levée de bouclier la semaine dernière. La Commission européenne a donc fait une place au nucléaire et au gaz dans sa « taxonomie verte ». Un jargon européen pour désigner la liste des activités éligibles aux nouveaux investissements verts européens. Les écologistes déplorent un signal très malvenu de la part du continent qui se voulait exemplaire dans la lutte contre le changement climatique. Les entreprises du nucléaire, à commencer par le géant français EDF, trépignent...

Le remplissage du Gazoduc Nord Stream  a démarré le 4 octobre 2021 avant même d'avoir reçu les autorisations de l'Allemagne et de la Commission européenne pour son exploitation.
Le remplissage du Gazoduc Nord Stream a démarré le 4 octobre 2021 avant même d'avoir reçu les autorisations de l'Allemagne et de la Commission européenne pour son exploitation. AFP - ALEXANDER NEMENOV
Publicité

En intégrant, le 31 décembre, juste avant la soirée du réveillon, le nucléaire à sa taxonomie verte aux côtés des énergies éolienne et solaire, la Commission décrétait que cette technologie avait bien un rôle à jouer dans la transition énergétique. La « taxonomie verte », dans le jargon de l'UE, c'est un guide pour les investisseurs afin de les aiguiller vers les activités qui contribuent aux objectifs européens de neutralité climatique. C'est un pilier du plan climat de l'UE pour favoriser la finance durable.

Ces jours-ci, alors que les centrales françaises sont en partie hors-service pour cause de maintenance, le patron d'EDF a appelé à lancer la construction des réacteurs de nouvelle génération. Un processus long, complexe et coûteux. Quoi de mieux pour ce faire que de bénéficier des financements de l'Union européenne via son plan de relance de 750 milliards d'euros.

En réalité, rien n'est encore fait, mais les résistances ne manquent pas

Dans une bataille qui a duré des mois pour faire accepter le nucléaire dans la taxonomie (non sans exiger de garanties techniques sur les solutions d'enfouissement notamment...) la France était en pointe. Elle a des arguments : elle prend en ce début d'année la présidence tournante du Conseil européen. Paris veut sauver sa filière nucléaire et garantir son indépendance énergétique.

Et pour cela, elle a agrégé le soutien tacite d'une dizaine de pays favorables au gaz comme source d'énergie de transition pour soutenir leurs revendications respectives. La Pologne, la Hongrie notamment. Mais si cette alliance de circonstance a fini par peser, elle a aussi contribué à durcir la position des tenants des énergies renouvelables, comme l'Espagne... L'Autriche menace, elle, de saisir la justice contre la décision de la Commission. 

Quant à l'Allemagne, son équipe dirigeante est plutôt tiraillée...

Tiraillée entre ceux qui rejettent le nucléaire et le gaz, et ceux qui sont soulagés de voir le gaz conforté comme énergie de transition. L'Allemagne incarne sans doute le mieux cette dépendance européenne au gaz dont on voit aujourd'hui les conséquences au niveau géopolitique dans son bras de fer avec la Russie.

En 2020, 39% des bâtiments construits étaient équipés pour être chauffés au gaz. Bien qu'émetteur de dioxyde de carbone, le gaz naturel est une énergie modulable, qui peut servir de transition vers une économie bas carbone en attendant que les alternatives renouvelables se déploient pleinement. Voilà donc les nouvelles clauses proposées par la Commission européenne. Pour le camp des écologistes, à commencer par ceux qui sont au gouvernement, on avale son chapeau. 

Est-ce que tout ça ne risque pas de brouiller l'image d'une Europe pionnière en matière d'ambitions climatiques ?

C'est un risque, d'après plusieurs organisations environnementales compte tenu des aléas qui entourent le nucléaire et l'impact du gaz sur l'environnement. L'Europe ambitionne depuis 2019 et son Pacte vert de devenir le premier continent neutre en carbone en 2050. Son exemple est scruté et doit servir de référence internationale.

Aujourd'hui, Bruxelles donne au gaz naturel d'une part et au nucléaire d'autre part, un rôle dans la transition énergétique afin de satisfaire les uns et les autres. Pour des considérations politiques donc. Le danger, selon les organisations comme le Réseau action climat, c'est que le gaz et le nucléaire attirent une part des investissements publics et privés qui seraient allés autrement aux énergies renouvelables, type éoliennes et solaires par exemple.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes