La crise de la Silicon Valley Bank va-t-elle entraver la lutte contre l’inflation?
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L’effondrement de la Silicon Valley Bank (SVB) remet-il en cause le programme de lutte contre l’inflation menée par la Réserve fédérale (Fed) ? C’est la conviction partagée par de nombreux analystes. Ils s'attentent à ce que la Fed freine dorénavant la remontée des taux d'intérêts.

Cette soudaine déroute, suivie du plongeon à la Bourse de plusieurs banques régionales, a démontré à quel point le système bancaire a été déstabilisé par la remontée rapide des taux d’intérêts décidée par la Réserve fédérale pour calmer la hausse des prix. Car la Silicon Valley Bank (SVB) n’a pas fait de pari risqué, elle a tout simplement pâti des placements devenus contre-productifs depuis que la Banque centrale des États-Unis relève vigoureusement le loyer de l’argent.
Depuis juillet 2022, le taux directeur de la Fed est passé de quasiment 0 à +4,5%. Avec cette trajectoire, les obligations d'État de longue durée prisées par les banques pour équilibrer leur bilan ont brutalement perdu de leur valeur. D’où le trou d’air de la SVB et de la Signature Bank.
La Fed pourrait-elle ralentir son programme de lutte contre l’inflation pour éviter les dommages collatéraux ?
On dit que les taux grimpent jusqu'à ce que quelque chose se brise dans l'économie. C'est peut-être ce moment de rupture qui vient de se produire. Le dilemme de la Fed s’est transformé en trilemme. Jusqu’à aujourd’hui, les banquiers centraux devaient calibrer la hausse des taux pour éviter qu’elle ne pénalise trop l’activité, ils devaient terrasser l’inflation sans provoquer de récession. Maintenant un nouveau risque bien pire se profile : celui d’un tangage permanent du système financier malmené par cette nouvelle donne. La houle pourrait très vite se transformer en tempête boursière, comme on l'a vu ces derniers jours.
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Ce qui a été évité grâce à l’action rapide des autorités américaines et de la toute-puissante Fed.
La Fed a déployé un nouveau filet de sécurité pour les banques régionales. Si ces établissements sont à leur tour confrontés à des retraits massifs de clients affolés, ils pourront bénéficier d'une ligne de crédit pour y faire face sans être contraints de brader les obligations d'État inscrites à leur bilan. Les banques auront un an pour rembourser ces emprunts accordés à un taux très amical et les obligations d'État qu'elles apporteront en garantie seront acceptées à leur valeur faciale et non la valeur du marché.
Avec ce dispositif, la Fed protège le système bancaire, et aurait donc les mains libres pour poursuivre son programme de lutte contre l'inflation. Un virage à 180 degrés parait donc improbable, mais plus personne n'imagine la Fed remonter ses taux directeurs d'un demi-point la semaine prochaine comme le pronostiquait jusqu'alors le marché. Elle agirait comme si elle ignorait ce qui vient de se passer. Difficile pour elle d'ignorer également le niveau de l'inflation. Les chiffres de février seront publiés dans la journée.
La Banque centrale européenne (BCE) pourrait-elle revoir son programme à l’aune des déboires de la SVB ?
Officiellement tout va bien sur le vieux continent. À Berlin comme à Paris, les gouvernants assurent que les banques européennes sont à l’abri de la contagion. Mais la BCE ne peut rester insensible à ce nouveau facteur de risque. On verra jeudi 16 mars, à l’issue de la réunion du conseil des gouverneurs, comment elle intègre cette nouvelle inconnue, avec un conseil des gouverneurs toujours divisé. Et cette crise outre atlantique donne du grain à moudre aux colombes. C'est-à-dire les pays du sud de la zone euro qui privilégient une remontée en pente douce des taux d’intérêts.
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