Aujourd'hui l'économie

La nouvelle élite économique syrienne

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L'homme d’affaires syrien Musan Nahas est venu en France pour faire la promotion de son pays lors du sommet économique franco-arabe qui s’est tenu à Paris à la mi-mars. Sa présence a été révélée il y a quelques jours. Cet homme appartient à la nouvelle élite économique du pays au service du président Assad.

L'entrepreneur syrien Musan Nahas, proche du président Bachar el-Assad (photo), s'est rendu en France mi-mars lors du sommet économique franco-arabe.
L'entrepreneur syrien Musan Nahas, proche du président Bachar el-Assad (photo), s'est rendu en France mi-mars lors du sommet économique franco-arabe. © REUTERS/SANA
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Un sérail en grande partie renouvelé depuis le début de la guerre civile, pour promouvoir au mieux les intérêts du couple présidentiel. L’économie syrienne est en pleine déliquescence. Elle a été broyée par douze ans de conflit, puis la crise libanaise, et maintenant le double séisme qui a frappé le nord du pays. Et ce qui en reste est littéralement capturée par la famille du président. Les chefs d’entreprise ont été mis au pas pour que son entourage - son frère, son épouse - tire le plus grand profit de cette rente de situation, à coups de pressions sur la classe économique.

Le représentant syrien présent à Paris fait partie de ce nouvel establishment ?

Musan Nahas est en partie issu de l’ancien monde des affaires. Son oncle a bâti un empire dans le secteur de l’automobile et du tourisme à l’époque de Hafez el-Assad. Il est en cours pour sa proximité avec l’Iran. En tant que chiite, il est devenu un homme incontournable dans la relation avec Téhéran. Il représente notamment la société iranienne du pétrole en Syrie. Selon le site d’information Syria Report, le père de Bachar avait fait des grandes familles ses alliés, en libéralisant partiellement l'économie. Leurs enfants ont accompagné l'arrivée au pouvoir du fils el-Assad, mais la guerre a redistribué les cartes.

Les grandes familles ont été progressivement évincées par des hommes nouveaux.

Des profiteurs de guerre issus de milieux plus modestes et qui doivent souvent tout au couple présidentiel. Ils sont aussi chargés des basses besognes quand il faut presser des chefs d’entreprise, pour qu’ils paient par exemple des amendes, fiscales ou autre. Le fruit de cette dîme arbitraire dépasse le montant de la collecte des impôts. Elle ne va pas dans les caisses de l’État mais dans celles des associations ou des banques contrôlées, voire créées par la première dame du pays.

L’épouse du président joue un rôle de plus en plus influent dans la sphère économique

On lui prête un rôle de conseillère en affaires étrangères. Et depuis le décès de sa belle-mère en 2016, cette ancienne de la banque américaine JP Morgan est devenue la gardienne avisée des intérêts économiques du couple, avec une emprise sur le secteur de l’immobilier, de la banque et des télécommunications. Certaines de ces activités étaient monopolisées par l’homme d’affaires Rami Makhlouf avant le début de la guerre. L'ami d'enfance du président et grand argentier du régime est tombé en disgrâce. Il a dû se soumettre aux ordres du couple et céder plusieurs de ses entreprises.

Musan Nahas est venu à Paris pour tenter de faire revenir les sociétés françaises en Syrie. Avec succès ?

Leur retour parait improbable en raison des sanctions que le gouvernement maintient, comme il l’a rappelé récemment. Même les nouveaux alliés russes de la Syrie restent très prudents dans leurs projets économiques, parce qu’ils ont d’autres priorités avec leur guerre en Ukraine. Mais aussi parce que le retour sur investissement parait bien incertain dans ce pays isolé par les sanctions et où l’économie est siphonnée par la famille el-Assad.

Selon Syria Report, cette mainmise est un obstacle à la reconstruction et la relance du pays. En ce moment, des millions de Syriens survivent grâce à l'aide alimentaire fournie par les ONG. En cette période de ramadan, traditionnellement un moment de fête, la viande a quasiment disparu des assiettes et les lumières sont éteintes dans les villes, faute d'électricité. Pas plus d'une heure de courant par jour dans le pays contrôlé par le régime.

► À lire aussi : La mystérieuse visite d'un homme d'affaires syrien à Paris

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