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Emploi: l’industrie du jeu vidéo toujours en zone de turbulences

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À l’échelle mondiale, le secteur du gaming se porte bien : il a généré l’an dernier plus de 184 milliards de dollars de revenus et pèse désormais plus lourd que la musique et le cinéma réunis. Pourtant, on assiste depuis l’an dernier à des dizaines de plans sociaux.

Sega a annoncé un plan social en Amérique et en Europe.
Sega a annoncé un plan social en Amérique et en Europe. © AFP/Yuichi Yamazaki
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Malgré un cru exceptionnel de jeux au succès tant critique que populaire, 2023 fut une année noire pour le secteur du jeu vidéo sur le plan de l’emploi : plus de 10 000 suppressions de postes à travers le monde et des dizaines de studios poussés à la fermeture. L’engouement lié au Covid-19 s’est estompé au fur et à mesure que les confinements se terminaient et la hausse brutale des taux d’intérêts rend désormais plus difficile de financer des jeux toujours plus coûteux et qui ne trouvent pas toujours leur public. La saignée ne s’est pas arrêtée avec le passage à la nouvelle année : rien que sur les deux premiers mois de 2024, il y a déjà eu 8 000 suppressions d’emplois dans l’industrie. Autant dire que le triste record de 2023 sera très certainement pulvérisé bien avant la fin de l’année.

Dernière en date à annoncer un plan social : Sega vient d'annoncer 300 suppressions d'emplois dans ses branches Europe et Amérique. L’entreprise japonaise ne fabrique plus de consoles de jeux depuis plus de vingt ans mais reste un studio et un éditeur important avec des licences comme Sonic et la série des Total War. L’an dernier, SegaSammy, la maison mère de Sega, a pourtant réalisé un chiffre d’affaires de 2,6 milliards d’euros pour un bénéfice de plus de 300 millions d’euros, en hausse de 46% par rapport à l’année fiscale 2022. Mais l’horizon s’assombrit. « Notre environnement d’affaires a changé rapidement avec la fin des confinements et le ralentissement économique dû à l’inflation, particulièrement en Europe. Notre profitabilité est en recul », écrit ainsi dans un message aux actionnaires, SegaSammy, pour justifier ces suppressions d’emplois. Autrement dit : « L’entreprise est encore profitable, mais pas assez pour rassurer les actionnaires. »

Face à cette logique mortifère, les salariés s'organisent timidement

On retrouve cette même logique chez Phil Spencer, le puissant patron d’Xbox, la division Jeu vidéo de Microsoft. Microsoft, première entreprise de la planète en termes de capitalisation boursière après avoir finalisé l’an dernier l’une des plus grosses acquisitions de l’histoire l’an dernier en rachetant Activision Blizzard pour 75 milliards de dollars et qui a annoncé 1900 suppressions d’emplois au sein de sa branche gaming en janvier. Dans une récente interview accordée au média spécialisé Polygon, Phil Spencer explique : « Ce qui m’inquiète le plus dans l’industrie c’est l’absence de croissance. (…) Or, nous devons montrer de la croissance à nos investisseurs, sinon pourquoi les actionnaires achèteraient-ils nos actions ? » Tout est dit. Le marché a arrêté de croître indéfiniment (sans pour autant reculer), et la stabilité financière ne suffit pas pour satisfaire les actionnaires. À défaut de pouvoir séduire un nouveau public, la seule solution pour augmenter la profitabilité des entreprises devient alors de réduire les coûts en supprimant des emplois.

Face à cette logique mortifère, les salariés du secteur commencent timidement à s’organiser et donc à se syndiquer dans un secteur dont ce n’est pas du tout la culture. Quelques mois après une première série de licenciements, Sega of America, la branche américaine de l’entreprise japonaise, est ainsi devenue la première grosse entreprise du secteur aux États-Unis à ratifier une convention collective. Les employés concernés vont être augmentés dès cette année. En cas de licenciement, puisque c’est la tendance, le nouveau contrat leur garantit aussi d’être prévenus à l’avance et d’être indemnisés.

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