Pourquoi l’arabica est le café le plus bu (et pourquoi ça ne durera peut-être pas)
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Une étude génétique révèle les secrets des origines et du goût du café le plus consommé dans le monde, apparu il y a 600 000 ans en Afrique de l'Est, et désormais vulnérable au réchauffement climatique. (Rediffusion)

Des dizaines d’espèces de café poussent sur la planète, mais seules deux finissent dans vos tasses : le robusta et surtout l’arabica, qui représente 60% de la production mondiale de café, parce qu’il est le meilleur. Le robusta est le père de l’arabica, né en Éthiopie il y a 600 000 ans, comme vient de le préciser une étude génétique internationale menée par une soixantaine de scientifiques et publiée en avril 2024.
« Le robusta s’est hybridé avec une autre espèce d’Afrique de l’Est, l’eugenoides, pour former l’arabica, détaille Valérie Poncet, chercheuse à l’Institut de recherche pour le développement (IRD, à Montpellier), qui a participé à cette étude. Il s’agit d’une hybridation spontanée. Certains pensent que c’est un événement unique, ce qui est encore à discuter. »
Faible diversité génétique
Grâce à l’étude du génome de l’arabica et de ses deux espèces parentales, on sait aussi pourquoi Coffea arabica a un tel succès. « C’est l’une des questions qu’on s’est posée, relève Valérie Poncet : comment l’arabica, issu du robusta, un café plus amer, a un goût aussi fin et équilibré ? En réalité, aucun des deux sous-génomes hérités de ses parents ne domine l’autre. »
L’arabica est né par hasard il y a 600 000 ans, et c’est assez peu à l’échelle du vivant, ce qui explique la faible diversité génétique d'une plante qui doit son nom à la péninsule arabique – c’est au Yémen que l’Homme a lancé sa diffusion, sa mondialisation. « On dit par exemple qu’une seule plante a été introduite en Haïti, avant d’être ensuite cultivée en Amérique du Sud. Ce qui fait qu’on a très peu de diversité génétique, donc finalement très peu de potentiel de résistance aux maladies, également très peu de potentiel adaptatif vis-à-vis du changement climatique », souligne la généticienne Valérie Poncet.
Un café qui aime le froid
Le réchauffement climatique menace l’arabica, une plante qui apprécie les nuits fraîches. « L’arabica est originaire des hauts plateaux d’Éthiopie, à une forte altitude, alors que le robusta est originaire essentiellement d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, à des altitudes très basses, précise Romain Guyot, également chercheur à l’IRD et co-auteur de l’étude. L’arabica a besoin de températures plus faibles pendant la nuit, et s’il y a un degré de plus durant la nuit, on va perdre jusqu’à 200 kilos de café marchand à l’hectare, ce qui est énorme, notamment pour les petits producteurs. »
Mais ce qui est énorme également, c’est le coût environnemental du café, établi par le WWF, le Fond mondial pour la nature : 140 litres d’eau pour une simple tasse !
C’est en tout cas ce que dit la légende : le café, et ses vertus excitantes, auraient été découverts par un berger. Ses chèvres gambadaient jour et nuit après avoir mangé les fruits rouges d'une plante inconnue. Un autre animal, la civette (qui ressemble à chat), aime aussi les baies du caféier, les cerises, qu'elle digère à moitié. On récupère ensuite, dans ses déjections, les graines de café pour en faire le kopi luwak, l'un des cafés les plus chers au monde. Oui, du kawa dans du caca. C'est la digestion qui lui donne un goût incomparable, au prix incomparable : 50 euros la tasse – c'est un peu fort de café.
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