Chronique des médias

La liberté des médias en Turquie

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Avant le scrutin présidentiel et législatif de dimanche 14 mai, focus sur la liberté de la presse et des médias en Turquie.

Depuis 2014, 73 journalistes ont été condamnés à de la prison en Turquie pour « offense au président ».
Depuis 2014, 73 journalistes ont été condamnés à de la prison en Turquie pour « offense au président ». © AP/Emrah Gurel
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Selon Reporters sans frontières, la Turquie est cette année 165e dans le classement de la liberté de la presse, juste après la Russie. C’est dire à quel point le pays malmène ses journalistes et contraint les médias. 38 professionnels de l’information sont d’ailleurs emprisonnés pour de divers motifs. Ce peut être bien sûr parce qu’ils appartiennent des médias pro-kurdes – dix d’entre eux ont été arrêtés pour ce motif fin avril. Mais ce peut être tout simplement pour « offense au président » Recep Tayyip Erdogan.

Depuis 2014, 73 journalistes ont été condamnés à de la prison sur ce prétexte. Pour cela, le pouvoir s’est conçu un appareil pénal et une législation anti-terroriste à sa main : pour lutter contre les Kurdes ou les Gülenistes, mais aussi pour criminaliser l’information libre, il a fait voter en octobre une loi punissant de trois ans de prison toute personne publiant des « fausses informations ». Cette même loi prévoit que les sites d’infos passent sous le régime de la presse, ce qui permet de mieux contrôler internet, car ces sites ont besoin pour vivre de l’agence de distribution de la publicité publique, la BIK, dépendante du gouvernement.

► À écouter aussi : Turquie: inquiétude face à l'augmentation des agressions commises envers les journalistes

Désir d'échapper à la propagande

En Turquie, selon RSF, neuf médias sur dix sont sous le contrôle du pouvoir. Bien sûr, le régulateur des médias, le Haut conseil de l’audiovisuel (RTÜK), est tout autant inféodé. Trois chaînes qui avaient critiqué la gestion chaotique du séisme en début d’année ont été sanctionnées par le régulateur. Un journal, BirGün et une agence de presse indépendante, l’Anka, ont été, l’un et l’autre, obligés par un juge de retirer leurs contenus. Le premier avait enquêté sur la vente de vêtements initialement donnés pour les victimes du tremblement de terre et la seconde avait révélé l’attribution à des proches du pouvoir de marchés de reconstruction dans la zone sinistrée.

Pas étonnant que l’opinion publique se soit tournée vers des médias plus critiques, que ce soit des médias indépendants (Fox TV, Halk TV, Tele1, Sözcü) des sites d’info locaux ou de grands médias internationaux en langue turque comme la Deutsche Welle ou BBC. La crise économique avec son hyperinflation a avivé un désir d’échapper à une propagande absurde. S’il y a donc sans doute plus d’opposition qu’après la reprise en mains de 2016, suite à la tentative de coup d’État güleniste où 3 000 journalistes avaient perdu leur emploi et 150 médias avaient été fermés, il y a néanmoins encore beaucoup de violence.

Erdogan accuse les journalistes pour masquer le déclin du pays. Et ses sbires ultranationalistes s’en prennent, en pleine rue, à des éditorialistes qui critiquent la situation économique et politique.

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