Chronique des médias

Un possible rachat du journal Le Parisien par Vincent Bolloré suscite l'effroi en interne

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Alors que Vincent Bolloré pourrait racheter le quotidien français Le Parisien, très populaire dans l'Hexagone, cette perspective suscite l'inquiétude des salariés du journal. Sa rédaction a-t-elle les moyens de s'opposer à une telle perspective ?

Le siège du journal Le Parisien se situe au 10 boulevard de Grenelle, à Paris.
Le siège du journal Le Parisien se situe au 10 boulevard de Grenelle, à Paris. AP - Thibault Camus
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Jeudi 11 septembre, les 474 salariés du Parisien et son édition nationale Aujourd'hui en France ont voté à l'unanimité un texte qui s'oppose au « projet de vente du Parisien au groupe Bolloré » et qui dénonce le mutisme de leur direction. Si ses enfants paraissent ne pas tous être sur la même longueur d'onde, il semble que Bernard Arnault soit lui, en effet, bien décidé à faire affaire avec Vincent Bolloré en lui vendant le quotidien.

Les deux hommes se côtoient, s'apprécient, et sont même allés ensemble, il y a un an, au Puy-du-Fou de Philippe de Villiers, selon Le Nouvel Obs. Après s'être opposés sur le contrôle du groupe Lagardère, en 2020, ils sont tombés d'accord. Bolloré a fini par avoir Lagardère, donc Europe 1 et Le Journal du Dimanche, tout en cédant Paris Match à LVMH.

C'est à la fin juin, à Saint-Tropez, que les deux milliardaires se sont vus pour discuter du rachat du Parisien. L'affaire permettrait à Bernard Arnault de se retirer d'un quotidien qui ne cesse d'accumuler les pertes : le chiffre de plus de 500 millions d'euros en dix ans est évoqué. Du côté de Vincent Bolloré, la prise de contrôle du Parisien serait un levier d'influence précieux dans son empire médiatique.

Un rachat qui suscite l'effroi en interne

Mais au sein du journal, un tel rachat suscite l'effroi pour des raisons idéologiques. Vincent Bolloré est, en effet, connu pour mener un combat civilisationnel contre l'islamisation de la société et l'immigration et pour apporter son soutien à des figures d'extrême droite, telles que Jordan Bardella ou Éric Zemmour.

Sa méthode consiste toujours à mettre des hommes à lui pour imposer sa ligne éditoriale et à faire partir les journalistes qui ne s'y retrouvent pas. Pendant quelque temps, on a cru qu'il pouvait y avoir des exceptions, comme au sein du groupe Prisma qui édite Capital ou GEO.

Mais en définitive, Vincent Bolloré vient d'étendre les pouvoirs de Serge Nedjar, le patron de CNews, en le nommant à la tête des rédactions de l'ensemble du groupe de presse. Au Parisien, on redoute donc cette vente qui serait en complète contradiction avec les valeurs de neutralité de ce journal né de la Résistance.

Freiner l'appétit de Vincent Bolloré, une tâche impossible en l'état

Reste que les journalistes du quotidien n'ont pas vraiment les moyens de s'opposer à une telle perspective. S'il existe une vieille règle anti-concentration selon laquelle on ne peut pas être à la fois propriétaire d'une chaîne de télévision, d'une radio et d'un quotidien national, il suffira à Vincent Bolloré d'arrêter Aujourd'hui en France pour n'être plus acquéreur que d'un quotidien régional.

Faute d'un droit d'agrément demandé par les journalistes, il est donc impossible de freiner l'appétit de Vincent Bolloré dans les médias et leur instrumentalisation idéologique au mépris des rédactions comme des lecteurs. 

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