Chronique des matières premières

L’eau cotée en Bourse, un marché qui fait polémique

Publié le :

C’est aujourd’hui la Journée mondiale de l’eau. « La valeur de l’eau » est le thème choisi, et il tombe à pic. L’eau est cotée depuis décembre dernier à la Bourse de Chicago. Ce qui fait craindre à certains une dérive financière.

Cela fait au moins 20 ans que les experts planchent sur l'avenir de l'eau sur les marchés financiers.
Cela fait au moins 20 ans que les experts planchent sur l'avenir de l'eau sur les marchés financiers. Brianna Soukup/Portland Press Herald via Getty Images
Publicité

Le 7 décembre dernier restera dans les annales des matières premières. C’est ce jour-là que le premier marché à terme de l’eau a été lancé, à la Bourse de Chicago, un marché qui fixe le prix de l’eau à l’horizon de plusieurs mois ou années. Le prix varie peu depuis septembre dernier et tourne autour de 500 dollars par acre-pied, soit un volume de 1,2 million de litres.

Cela fait au moins 20 ans que les experts planchent sur l’avenir de l’eau sur les marchés financiers. Des marchés locaux ont existé au Chili et existent encore en Australie. Mais avec des marchés à terme, même s’ils ne concernent que l’eau de Californie pour l’instant, l’eau devient un pur produit financier. Et c’est ce qui inquiète la Coalition Eau. Les 250 ONG qui la composent dénoncent « un glissement dangereux vers la financiarisation de la nature ». La crainte de ces organisations, c’est « une spéculation massive et des prix de l’eau qui grimpent », au détriment du droit le plus fondamental, celui d’un accès à l’eau pour tous.

► À consulter aussi : La crise de l'eau en 5 questions

L’eau, une matière première à part

Cette levée de boucliers ne repose sur rien, commente Bernard Barraqué, directeur de recherche émérite en politique publique de l’eau au CNRS. L’eau ne sera jamais une matière première comme les autres, explique-t-il. De fait, c'est aujourd’hui seulement une infime partie de la ressource qui fait l’objet de marchés.

Il s’agit d’un marché très régional aux États-Unis, précise le chercheur puisqu’on ne parle que de la Californie. Il ajoute : l’objectif est précisément d’éviter toute spéculation. « C’est un garde-fou. Destiné à mettre un terme aux ventes d’eau sauvage qui existaient à cause des sécheresses ». Autrement dit, un moyen d’encadrer les prix et éviter qu’ils ne montent en cas d’incendie par exemple ».

Transporter l’eau : un vrai défi

Un négociant en matières premières tempère également et rappelle que « pour que l’eau soit un bien de marché il faudrait qu’elle soit l’objet d’une rivalité et la propriété de quelqu’un, or les deux critères ne sont que rarement réunis ».

Pour que l’eau devienne une matière première comme les autres, il faudrait aussi trouver un moyen de transporter de gros volumes sur de longues distances ce qui est encore loin d’être possible.

► À écouter aussi : Allons-nous manquer d'eau?

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes