Chronique des matières premières

Le poivre de Penja victime de son succès

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C’est une des rares appellations protégées africaines. Le poivre de Penja du Cameroun a été labellisé en 2013. Ce qui aurait dû faire la richesse de ses producteurs, mais les contrefaçons on fait chuter les prix sur le marché local.  

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Image d'illustration © ullstein bild via Getty Images
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C’est la triste rançon du succès. Même si aucun chiffre officiel n’existe, les producteurs estiment que 50% du poivre de Penja vendu localement au Cameroun est contrefait. En trois ans, les fraudeurs ont semé « un grand désordre » en toute impunité, confie un acteur de la filière. Un désordre qui s’exprime sur le marché local essentiellement. Les 30% de production qui partent à l’étranger sont plus sécurisés, car souvent achetés directement dans la région d’origine.

La contrefaçon a plusieurs visages : on trouve du poivre camerounais sans appellation vendu sous le nom de Penja, visuellement il est très difficile de les distinguer, on trouve aussi du poivre importé de Dubaï qui n’a rien de Penja, mais qui en porte l’étiquette.

À cause de la fraude, les prix ont chuté de moitié

Les prix qui caracolaient à 15 000 francs CFA le kilo – soit près de 23 euros – il y a trois ans, sur le marché local ont chuté de moitié. Un manque à gagner énorme pour les producteurs qui ne rentrent même plus dans leur coût de production qui sont évalués à 10 000 francs CFA, explique Jean-Marie Sop secrétaire générale de l’Association de promotion de l’IGP Penja. Autre conséquence, les rendements ont baissé et les producteurs sont moins rigoureux dans le respect du cahier des charges imposé par le label délivré par l’Oapi, l’Organisation africaine de la protection intellectuelle.

Pour l’instant, seule consolation pour les promoteurs de l’IGP (Indication géographique protégée) les superficies n’ont pas diminué.

Des outils de protection enfin opérationnels

Les défenseurs du poivre de Penja comptent sur la nouvelle campagne qui va débuter en décembre pour sortir du marasme. Depuis quelques mois, en effet, les outils tant attendus pour protéger le poivre sont opérationnels. L’unité de contrôle – agréage – et de conditionnement du poivre est enfin prête dans la zone même de production de Penja. La majorité des grains labellisés passeront par ce centre, les volumes qui seront préparés ailleurs devraient être validés et estampillés par le seul organisme autorisé.

L’objectif des producteurs est de retrouver un prix de vente bord-champ de 13 000 francs CFA le kilo, soit une vingtaine d’euros en 2022. Pour l’instant 400 tonnes de poivre de Penja sont produites. L’objectif est fixé à 1 000 tonnes d’ici à 5 ans. À condition que l’épice camerounaise retrouve ses lettres de noblesse d’ici là.

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