Chronique des matières premières

Le phénomène climatique El Niño arbitre des prochaines récoltes?

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Avec son lot de sécheresses et de pluies diluviennes, le phénomène El Niño pourrait amplifier les effets du changement climatique et être l'arbitre des prochaines récoltes de céréales, sucre, café, riz ou encore huile de palme dans les mois qui viennent.  

Les experts avertissent que la production de riz en Asie du Sud et du Sud-Est risque de souffrir de l'arrivée d'El Niño.
Les experts avertissent que la production de riz en Asie du Sud et du Sud-Est risque de souffrir de l'arrivée d'El Niño. AP - Rafiq Maqbool
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On en parle comme le loup blanc depuis plusieurs mois. Mais son pouvoir de nuisance reste encore difficile à quantifier. Les poids lourds du marché des matières premières que sont le Brésil, l'Indonésie, les États-Unis ou encore l'Australie sont généralement les cibles privilégiées d'El Niño. La perturbation se matérialise en effet par un réchauffement anormal des températures des eaux de surface du Pacifique Centre et du Pacifique Est, le long de la façade latino-américaine.

En juillet, la Coface, l'organisme chargé d'assurer les entreprises françaises qui investissent à l'étranger, réputé pour ses évaluations du risque pays, évoquait la possibilité d'une dégradation de la production de ces grands exportateurs, mais aussi de celles de grands producteurs tels que l'Inde ou la Chine « supposés autosuffisants sur le plan alimentaire » en temps ordinaire. En cas de récolte plus faible que prévu, ils devront importer plus, ce qui pèsera forcément sur le marché mondial.

Inquiétude sur la récolte de café indonésienne

En Indonésie, El Niño se fait déjà sentir sur les deux tiers de l'archipel, selon l'agence nationale de météorologie (BMKG). Sont notamment touchées Java et Sumatra, deux régions clés pour la production de café qui redoutent de voir les sècheresses s'intensifier d'ici à la fin d'année, alors que la production a déjà souffert de pluies diluviennes qui ont fait chuter la récolte à son plus bas en dix ans. 

Dans les grandes zones cotonnières, l'effet d'El Niño est aussi redouté par les acteurs de la filière. En Inde et au Pakistan, il se traduit d'ordinaire par une baisse de la mousson avec des précipitations inférieures à la normale et inégalement répartie, selon le rapport Cyclope 2023, ouvrage de référence sur le marché des matières premières. La production de coton australienne est particulièrement à risque. Elle a été très exposée par le passé lors des précédents épisodes climatiques.

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La production de riz peut être épargnée en 2023

Sur le marché du riz, l'effet attendu est pour l'instant très incertain. Il dépendra du calendrier. Si la baisse de pluviométrie qui caractérise El Niño, dans les rizières asiatiques, ne se manifeste qu'au dernier trimestre, la récolte de cette année sera globalement épargnée : les plants qui n'auront pas été récoltés sont moins vulnérables à ce stade de leur croissance. En revanche, si la production de cette année est peu affectée, il ne faut pas exclure un impact sur celle de 2024, commercialisée en 2025, explique Patricio Mendez del Vilar, économiste de la filière et auteur de la lettre mensuelle Osiriz éditée par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).

Mis à part l'Afrique du Sud, le continent africain est généralement moins concerné par El Niño. Mais Rabobank, institution néerlandaise engagée dans le financement du négoce de matières premières, s'inquiète d'un impact sur la récolte principale de cacao qui débute en octobre, au Ghana et en Côte d'Ivoire, les deux poids lourds du secteur.

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