Chronique des matières premières

Cannabis: ceux qui ont cru à la poule aux œufs d’or déchantent

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La dynamique des premières années d’ouverture du marché du cannabis s’est essoufflée. Depuis deux ans, le marché plafonne et les grandes sociétés du secteur ont vu leur valeur s’effondrer. Mais le marché reste prometteur, selon les experts qui parient sur le long terme.

Dans une rue de Los Angeles un panneau indique un dispensaire de Marijuana, le 24 mai 2024. (Image d'illustration)
Dans une rue de Los Angeles un panneau indique un dispensaire de Marijuana, le 24 mai 2024. (Image d'illustration) Getty Images via AFP - MARIO TAMA
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Elles s’appellent Canopy Growth, Truelieve Cannabis, Tilray Brands ou encore Curaleaf et ont en commun d’avoir cru démesurément à l’explosion du marché du cannabis. Que ce soit dans l’euphorie post-Covid, ou en espérant que Joe Biden changerait la donne, « ces sociétés ont levé de l’argent en pariant sur une évolution règlementaire rapide », explique Ludovic Rachou président de l’UIVEC le syndicat des acteurs du cannabis médical et du CBD en France et en Europe. Or, la législation, que ce soit en Amérique du Nord ou en Europe, évolue encore lentement, en raison notamment de la difficulté du marché à sortir de la législation sur les stupéfiants.

Une offre qui dépasse largement la demande

La valorisation de ces sociétés a été maximale jusqu’en 2021, comme le montre les données compilées par le Financial Times, et même démesurée par rapport à la réalité du marché. De fait, les États américains qui ont légalisé le cannabis n’ont toujours pas le droit de commercer entre eux. Certaines de ces sociétés dont la cotation s’est effondrée, payent aussi de mauvais choix stratégiques, tels que le financement de capacités de production énormes qui par endroit ont dû être revendues pour une bouchée de pain. « La Californie et l’Oregon en sont l'exemple : la surproduction a atteint jusqu’à 5 à 6 fois la demande locale, faisant inévitablement dégringoler les cours et ravivant la concurrence entre acteurs légaux et illégaux du cannabis » explique Ivana Obradovic directrice adjointe de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, qui a étudié la mise en œuvre concrète de la légalisation du cannabis en Amérique du Nord.

Parmi celles qui ont déchanté, on trouve notamment les entreprises canadiennes qui produisaient du cannabis médical -premier pays à légaliser l’usage en 2001- et qui ont été les premières à se positionner sur le marché légal du cannabis récréatif en 2018, ajoute la directrice adjointe de l'OFDT. Mais la taille du marché canadien a très vite montré ses limites et là aussi une partie des stocks produits ont dû être détruits.

Un marché qui se stabilise en attendant mieux

La valeur de ces « majors » du cannabis a atteint un point bas il y a un an. « Il y a depuis un réalignement de la bourse et des fondamentaux du marché » analyse Ludovic Rachou, pour qui ces sociétés ont maintenant atteint leur juste valorisation. Ce retour sur terre ne s’est pas fait sans victimes, puisque certaines ont dû fermer des sites, ou licencier pendant que d’autres ont survécu en se regroupant.

Ces acteurs ne représentent cependant que la partie émergée de l’Iceberg. Car ceux qui s’en sont le mieux sorti ne sont pas les acteurs cotés en bourse. L’avancée des législations dans plusieurs États américains a notamment profité à de nombreux petits acteurs privés. Et cela devrait se poursuivre.  

La croissance du secteur est « inévitable » selon nos interlocuteurs. Rien qu'en Europe ce marché pourrait plus que tripler entre 2027 et 2032 selon les prévisions de la banque d'investissement Bryan, Garnier & Co.

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