Chronique des matières premières

L'Algérie boude le blé français au détour d'un appel d'offres

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C'est un appel d'offres qui fait parler de lui. L'Algérie a ouvert une consultation pour acheter 50 000 tonnes de blé. Rien d'exceptionnel jusque-là. Sauf que les exportateurs français n'auraient pas été tenus informés. Un procédé qui fait penser à une mise à l'index.

Les Algériens mangent près de 250 kilos de pain par habitant et par an, le record mondial et ce pain est largement subventionné. (Image d'illustration)
Les Algériens mangent près de 250 kilos de pain par habitant et par an, le record mondial et ce pain est largement subventionné. (Image d'illustration) ©RYAD KRAMDI/AFP
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Si on s'en tient à ce qui est dit, les exportateurs français n'ont pas de raison de s'inquiéter. L'Algérie n'a jamais déclaré officiellement qu'elle ne voulait plus se fournir en blé venant de France. Mais dans les faits, c'est une autre histoire : le dernier appel d'offres émis par l'Algérie en début de semaine pour un achat de 50 000 tonnes de blé n'est pas arrivé sur le bureau des opérateurs de l'Hexagone alors qu'ils sont d'ordinaire tenus informés.

Un procédé très inhabituel

Pire, selon l'agence Reuters, il aurait été précisé à ceux qui ont été sollicités qu'il ne fallait pas qu'ils répondent en proposant du blé français. Une consigne peu courante : l'Office algérien interprofessionnel des céréales n'a pas l'habitude de spécifier les origines qu'il souhaite. C'est le négociant qui, en fonction du marché, fournit un blé compatible avec les exigences du pays, dont l'origine peut évoluer parfois même en cours de route. 

Les grains bleu-blanc-rouge ont une qualité conforme à celle demandée par l'Algérie, et offrent des gages en matière de sécurité de livraison. En revanche, le blé français est aujourd'hui plus cher que le russe, 15 dollars de plus par tonne. Autant de considérations qui entrent en ligne de compte et qui sont généralement étudiées lors de la réception des appels d'offres, mais qui ne sont pas tranchées en amont. Or c'est ce qui se passe aujourd'hui. « La France est boudée d'entrée de jeu » explique Gautier Le Molgat, directeur général de la société de conseil Argus Media France. 

Champ libre pour le blé russe

D'où le sentiment d'être face à une position de principe de l'Algérie même si les choses n'ont pas été dites clairement. Cet état de fait – qui reflète selon certains analystes la détérioration des relations diplomatiques entre les deux pays – porte un coup au moral des exportateurs français qui ont déjà cette année beaucoup moins de blé à vendre – 60% de moins hors UE – en raison d'une chute historique de la production

Il y a deux ans déjà, l'Algérie avait modifié son cahier des charges dans le sens d'une plus grande ouverture aux blés russes. Le procédé affiché ces jours-ci n'est peut-être qu'une autre version de la même histoire. Celle d'une relation franco-algérienne compliquée qui profitera peut-être une année de plus au blé de la mer Noire, abondant et compétitif.

Dans un communiqué, l’Office algérien interprofessionnel des céréales précise que l'appel d'offres du 6 octobre était « restreint » pour répondre à des besoins industriels spécifiques et rappelle que tous les fournisseurs habituels restent des partenaires stratégiques de l’Algérie.

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