L’Ukraine et la Russie, c’est 30% du commerce mondial de blé. Les tensions actuelles font donc craindre un grand bouleversement sur le marché des céréales.

Les conséquences pourraient être « colossales » sur le marché des céréales et oléagineux, confie un expert agricole. Et pour cause, le blé de la mer Noire, c’est presque un tiers du commerce mondial. L’impact pourrait être d’autant plus grand que cette année, l’Ukraine s’est illustrée par une récolte de blé record de plus de 32 millions de tonnes. Un chiffre qui lui a permis de prendre des parts de marché à la Russie au Nigeria et au Pakistan.
Mi-janvier, les marchés ont donc très vite réagi au vu des tensions géopolitiques grandissantes. « Un réflexe d’anticipation, et de peur », explique Sébastien Poncelet, directeur Développement chez Agritel, cabinet d’analyse des prix agricoles. Un réflexe qui s’est traduit sur les marchés à terme du blé, pour une livraison dans plusieurs mois donc - que ce soit sur le marché Euronext ou celui de Chicago - par des contrats qui ont pris 10% en une dizaine de jours. Mais la situation ne s’étant pas envenimée sur le terrain, les prix sont retombés. Les prix pour un départ immédiat des blés de la mer Noire – eux – n’ont pas sourcillé pour l’instant.
Un blocage des ports ukrainiens affecterait le marché
En cas d’intervention militaire russe, l’impact sur les exportations pourrait d’abord être logistique. Car la grande majorité des expéditions se fait par bateau via la mer Noire. Un blocage du pays et des ports ukrainiens affecterait le marché qui devrait alors se fournir ailleurs, avec à la clé, des délais de livraison qui s’allongeraient pour des acheteurs comme l’Égypte par exemple : quand le blé de la mer Noire arrive en 4 ou 5 jours, en Égypte, celui d’Argentine met 22 jours.
Le commerce du maïs pourrait aussi être affecté : l’Ukraine est devenue bien plus importante qu’elle ne l’était il y a quelques années, et occupe aujourd'hui la place de quatrième exportateur de grains jaunes avec 16% du commerce mondial. Les acheteurs d’huile de tournesol ont aussi de quoi s’inquiéter, l’Ukraine en est le premier exportateur mondial.
Autre facteur à prendre en compte, les représailles américaines. Il ne faut pas exclure, en cas d’intervention, que les États-Unis fassent pression sur leurs alliés pour qu’ils trouvent d’autres fournisseurs que la Russie. Par ricochet, le blé russe pourrait donc souffrir sur le marché.
Une atteinte à la prochaine production, le pire des scénarios
L’autre risque en cas d’escalade, c’est la désorganisation du travail dans les champs : elle pourrait affecter les semis de tournesol et de maïs du printemps, puis si la crise durait, les récoltes de blé cet été. Une perte de production impacterait inévitablement le marché mondial : céréales et oléagineux confondus, l’Ukraine exporte plus de 65 millions de tonnes par an.
« Si elles devaient durer, ces tensions pourraient peser sur la reconstitution des stocks de céréales qui ont été bien entamés depuis l’été 2020, du fait des achats massifs de la Chine qui a siphonné les stocks des grands exportateurs », rappelle Agritel. En résumé, la marge laissée pour des aléas climatiques ou géopolitiques est particulièrement réduite cette année.
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