Les dessous de l'infox, la chronique

Commémorations de la prise du Capitole: des récits irréconciliables

Publié le :

Un an après les événements qui ont conduit des centaines de manifestants à envahir le Capitole à Washington, la société américaine continue de se diviser au sujet de ce qui s’est réellement passé ce 6 janvier 2020. Au-delà d’une différence de perception sur les intentions de la foule ce jour-là, les soutiens les plus inconditionnels de Donald Trump perpétuent un narratif totalement déconnecté de la réalité.

Des manifestants pro-Trump font irruption dans le Capitole américain lors d'affrontements avec la police, lors d'un rassemblement pour contester la certification des résultats de l'élection présidentielle américaine de 2020 par le Congrès américain, à Washington, États-Unis, le 6 janvier 2021.
Des manifestants pro-Trump font irruption dans le Capitole américain lors d'affrontements avec la police, lors d'un rassemblement pour contester la certification des résultats de l'élection présidentielle américaine de 2020 par le Congrès américain, à Washington, États-Unis, le 6 janvier 2021. REUTERS - SHANNON STAPLETON
Publicité

Même si une majorité de citoyens ont désapprouvé l’assaut contre le Capitole, certains refusent toujours d’admettre ce que les images ont pourtant montré : une tentative insurrectionnelle tournant à l’émeute. La presse américaine a diffusé cette semaine une série de sondages. À en croire l’une de ces enquêtes, près d’un Américain sur cinq s’accroche au scenario de l’attaque sous faux drapeau. Autrement dit, selon eux, les violences n’auraient pas été commises par des partisans de Trump, mais par des militants antifas infiltrés dans la marche qui visait à empêcher la certification des résultats de l’élection par le congrès.

Certains dénoncent une machination du FBI, des sites complotistes comme le Gateway Pundit ont fait circuler le récit selon lequel, le FBI avait tout planifié pour donner au Congrès un prétexte afin d’interdire le port d’arme à feu, véritable obsession des ultras conservateurs.  

Investigations en ligne

En réalité, rien ne vient corroborer ces allégations sur l’implication du mouvement antifa ce jour-là. Les preuves ne manquent pas sur internet concernant le rôle joué par les partisans de Trump les plus déterminés. Journalistes, enquêteurs, services de renseignement ont pu mettre la main sur énormément d’éléments restés disponibles sur les réseaux, car nombre d’émeutiers se sont vantés d’avoir participé à l’attaque du Capitole.

Plusieurs centres de recherche, ou think tank ont examiné et analysé cette matière abondante. Comme Atlantic Council dont la mission DFRLab (Digital Forensic Research Lab) est d’identifier les sources de désinformation numérique. Le rapport « After the insurrection, how domestic extremists adapted and evolved after the january 6 US Capitol Attack » signé Jared Holt, répertorie le travail des influenceurs en amont de l’attaque et étudie la façon dont ils ont évolué par la suite, élaborant et diffusant une version alternative de la réalité. Le rapport revient en détail sur la mise en place d’un narratif « révisionniste » sur ces événements. Un récit relayé par nombre d’élus républicains, comme Paul Gosar, Ron Johnson, Thomas Massie, ou encore le sénateur Andrew Clyde qui déclarait lors d’une audition au mois de mai, qu’il n’y avait pas eu d’émeute, qu’on avait plutôt assisté à une promenade touristique. Personne ne conteste pourtant le bilan de 5 morts et de centaines de blessés et le fait que le Capitole, cœur battant de la démocratie américaine a été saccagé ce jour-là.

La responsabilité de Donald Trump

Ce qui conforte les partisans de Donald Trump dans ce délire conspirationniste, c’est que l’ancien président continue de propager la thèse de l’élection volée. Sa stratégie de reconquête du pouvoir, consiste à instiller le doute vis-à-vis des institutions : les élections, et la justice. Puisque tous les recours déposés pour contester l’issue du vote ont été déboutés par les juges, dont certains nommés par Donald Trump lui-même.

Face à la foule le 6 janvier 2020, l’ancien président avait incité à la marche sur le Capitole, ajoutant « vous ne pouvez pas reprendre votre pays en étant faible », puis il avait mis des heures avant de leur demander de rentrer chez eux. Si bien qu’aujourd’hui, nombre d’entre eux estiment qu’ils étaient dans leur bon droit en cherchant à interrompre le processus électoral par la force. Rien d’étonnant à ce qu’ils tentent aujourd’hui de réécrire l’histoire.

La démocratie en danger  

Le fait de ne pas pouvoir s’entendre ne serait-ce que sur le récit de ce qui s’est passé le 6 janvier 2022 continue d’accentuer la polarisation de la société américaine. À quelques exceptions près, les deux camps ne se parlent plus. Y compris sur les réseaux sociaux, car ceux que les grandes plateformes comme Twitter ont exclu, se retrouvent entre eux sur d’autres réseaux où ils entretiennent le récit d’une réalité alternative et le délire de persécution.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes