Menaces sur l’information

Jamal Khashoggi, journaliste saoudien assassiné

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Le cas Jamal Khashoggi, journaliste saoudien critique du pouvoir, assassiné en 2018.

Jamal Khashoggi en 2014.
Jamal Khashoggi en 2014. AFP/File
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Nulle sépulture pour Jamal Khashoggi dont le corps n’a jamais été retrouvé. Le 2 octobre 2018, le journaliste saoudien fait escale en Turquie : pour une démarche administrative, il a pris rendez-vous au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul. Une caméra de surveillance le filme lorsqu’il entre dans le bâtiment, personne ne l’a jamais revu.

À l’époque de sa disparition, Jamal Khashoggi - 59 ans - a déjà quitté son pays dont l’évolution l’inquiète. Le journaliste s’est installé aux États-Unis et c’est dans les colonnes du Washington Post qu’il évoque le pouvoir du jeune Prince héritier Mohammed ben Salman. « C’est en train de devenir le pouvoir d’un seul homme. Tout est sous son contrôle », raconte Jamal Khashoggi, interviewé sur France 24 en 2017. À propos de l’homme fort du royaume, le journaliste dissident poursuit : « il crée un climat d’intimidation et de peur. Les Saoudiens sont réduits au silence, rien n’est transparent. Cela n’est pas la bonne recette pour réformer l’Arabie saoudite ». Des critiques acerbes de la part d’un Saoudien jusque-là réputé proche de la famille royale, lorsqu’il travaillait pour la chaine Al Arab News ou pour le journal saoudien Al Watan.

L’ombre de Mohammed ben Salman

Dès la disparition de Jamal Khashoggi le 2 octobre 2018 à Istanbul, la police turque enquête et révèle rapidement qu’un commando d’agents saoudiens a assassiné le journaliste et fait disparaitre son corps avant de fuir la Turquie. L’affaire a un retentissement mondial. À l’époque Rapporteuse spéciale de l’ONU sur les exécutions extra-judiciaire, Agnès Callamard mène sa propre enquête qui conclut à l’implication de l’État saoudien. « Sans l’ombre d’un doute » dit-elle à RFI, en détaillant « un plan très élaboré qui a nécessité une coordination considérable et de gros moyens financiers ». Jusque dans les aspects les plus sanglants de l’opération puisque « la présence du médecin légiste qui a démembré le corps indique sans aucun doute la planification ». Le rapport d’une centaine de pages va encore plus loin, en mettant en cause le Prince héritier d’Arabie Mohammed ben Salman, surnommé MBS.« Tous les responsables impliqués dans le meurtre de Jamal Khashoggi faisaient partie de l’équipe rapprochée du Prince héritier. S’il le savait mais qu’il n’a rien dit, sa responsabilité pénale est engagée. S’il l’a commandité, sa responsabilité pénale est encore plus engagée », explique Agnès Callamard.

« Une justice non rendue »

L’Arabie Saoudite rejette cette version et organise un procès à huis clos pour huit accusés qui officiellement auraient agi de leur propre chef. Plusieurs condamnations à mort sont prononcées, elles seront ensuite commuées en peines de prison. En 2019, le dossier est clos pour le royaume. À l’international, l’assassinat de Jamal Khashoggi assombrit l’image de Mohammed ben Salman… mais pas pour longtemps. Après l’avoir tenu à distance, Joe Biden pour les États-Unis, Emmanuel Macron pour la France comme d’autres dirigeants recommencent rapidement à fréquenter le puissant Prince héritier. D’autant que la guerre en Ukraine a remis l’Arabie Saoudite et son pétrole en position de force. Jamal Khashoggi, « c’est le symbole d’une justice non rendue, déplore Agnès Callamard, aujourd’hui Secrétaire Générale d’Amnesty International France, c’est le symbole de la mémoire courte des politiques, c’est le symbole du monde dans lequel nous vivons où il y a vraiment une tentative de mettre de côté tout ce qui concerne le respect du Droit international ». Agnès Callamard raconte avoir reçu des menaces de la part d’officiels saoudiens alors qu’elle menait son enquête.

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