Menaces sur l’information

Ghana: Erastus Asare Donkor informe sur les mines d'or illégales pour sauver les générations à venir

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À la mi-temps de la trentième conférence des Nations unies sur le climat, qui se tient au Brésil, la société civile manifeste, ce samedi 15 novembre, à Belém. Un retour de la traditionnelle marche après plusieurs années d'absence faute d'autorisation dans les pays organisateurs. Militer pour les droits de l'environnement est parfois dangereux. Informer sur ce sujet peut l'être tout autant, comme l'illustre le cas d'Erastus Asare Donkor. Journaliste d'investigation au Ghana, il travaille pour The Multimedia group, une compagnie qui possède des stations radio et des chaînes de télévision.  

Des orpailleurs illégaux dans une mine d'or de Dunkwa-on-offin, dans le centre du Ghana. (image d'illustration)
Des orpailleurs illégaux dans une mine d'or de Dunkwa-on-offin, dans le centre du Ghana. (image d'illustration) AFP/DAVID ADADEVOH
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Erastus Asare Donkor s'est spécialisé dans les documentaires sur les mines d'or illégales : leurs effets sur l'eau, les forêts et la vie des populations locales. Et c'est ce qui lui vaut des pressions et des menaces. 

« Je couvre un domaine sensible, comme l’extraction illégale de l’or au Ghana. C'est un secteur qui pèse plusieurs milliards de dollars. Des personnes très riches et puissantes à tous les niveaux sont liées à ce secteur. Cela implique aussi beaucoup de corruption. Et donc ce que nous faisons est risqué », explique le journaliste. 

Un de ses documentaires, tourné en 2021 pour JoyNews a failli ne pas voir le jour. Alors qu'il couvre l'action d'une force liée au ministère de l'Environnement sur une mine illégale, des hommes armés interviennent. Il raconte : « Mon équipe et moi, avons été détenus pendant cinq heures par des militaires protégeant des mineurs qui saccageaient l’une des principales forêts du Ghana. Nous avons été fouillés. Les images de nos caméras ont été effacées. Mon chauffeur a été agressé physiquement ».

Il n'y a pas qu'en tournage qu'Erastus Asare Donkor est en danger. Lui et son entourage, parfois lointain, font l'objet de menaces. 

« Quelqu’un qui commente mes publications sur Facebook et qui porte le même nom de famille, a reçu un message. Il disait que peut-être, il pourrait ne pas m’avoir, moi Erastus, mais qu'il me livrerait son corps décapité pour me servir de leçon. Deux semaines après avoir signalé ça aux agences de sécurité, ce monsieur a été poignardé sous les côtes par deux hommes. Heureusement, il a survécu », se désole Erastus Asare Donkor.

Prendre des précautions face au danger 

« Mon entreprise a pris un certain nombre de mesures. Des caméras de vidéosurveillance ont été installées dans ma résidence. Ils ont aussi dû trouver une maison sûre pour moi et ma famille pour un temps. J’ai aussi dû changer de véhicule », déclare le reporter. 

Le journaliste de 49 ans est parti trois mois à l'étranger avec l'aide de Reporters sans frontière (RSF). Pas de quoi effacer la pression à son retour. 

« C’est encore frais dans ma tête. C’est quelque chose qui vous fixe des limites. Cela vous amène à vous auto-censurer. Ces jours-ci, je dois employer d’autres personnes pour faire le tournage sur le terrain à ma place », nous confie-t-il. 

Pour l'instant, Erastus Asare Donkor ne souhaite pas changer de spécialité. Il est essentiel pour lui d'informer sur ce qui se passe dans le pays, car « Au Ghana, 65 % de nos plans d’eau sont fortement pollués par des métaux lourds. 44 des 288 réserves forestières sont attaquées par des mineurs illégaux. Selon les recherches d'une agence pour la protection de l’environnement, les métaux lourds s’infiltrent dans notre chaîne alimentaire ».

Alors son travail, il le perçoit comme un devoir pour « sauver les générations à venir ». 

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