Quand l’histoire bascule

Syrie: l'attaque chimique du régime d'el-Assad sur la banlieue de Damas, un massacre resté impuni

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L’utilisation de l’arme chimique près de Damas le 21 août 2013 par le régime el-Assad... L'un des moments les plus atroces de la guerre civile syrienne. Au lendemain de ces frappes qui ont fait au moins 1 000 morts, dont de nombreux enfants, le monde se prépare à une intervention occidentale. Mais il n'en sera rien, les États-Unis reculent et au contraire, l'allié russe de Bachar el-Assad s'impose alors pour défendre le statu quo et enterrer pour une décennie les espoirs de changement pour l'opposition syrienne.

Des activistes syriens inspectent des corps de civils tués, selon eux, par des agents chimiques, le 21 août 2013, dans la banlieue de Damas.
Des activistes syriens inspectent des corps de civils tués, selon eux, par des agents chimiques, le 21 août 2013, dans la banlieue de Damas. REUTERS/Bassam Khabieh
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C'est la première vidéo qui émerge cette nuit-là. Des images filmées au téléphone. Toute une famille afflue dans un hôpital de fortune à l'est de la capitale, Damas. Des hommes en sous-vêtements, sans la moindre blessure apparente. Des petits corps inanimés, le teint livide posés à même le carrelage, des enfants. Comme l'explique ce médecin sur une autre vidéo cette nuit-là : « les premiers signes, les pupilles dilatées, la salive abondante, montrent les effets d'improbables agents neurotoxiques ».

L'hôpital, dans une zone assiégée et bombardée depuis des mois, n'a pas les moyens de répondre. Très vite, l'opposition syrienne accuse le régime d'être responsable d'un massacre inédit depuis le début de la guerre civile, une attaque chimique. « Je ne crois pas qu'il y ait de doute sur son auteur. J'exclus que l'opposition ait utilisé des armes chimiques. C'est clair, des femmes et des enfants ont été tués en masse dans la Ghouta orientale. C'est, je crois, le crime du siècle. La communauté internationale doit agir immédiatement pour le peuple syrien », explique l'opposant Walid Al Bounni au micro de RFI.

L’ONU confirme l’usage de gaz sarin

Le régime de Bachar el-Assad nie sa responsabilité et accuse l'opposition de vouloir provoquer une intervention internationale. Après un mois, l'attaque au gaz sarin est confirmée dans un rapport de l'ONU. Sans en nommer l'auteur, le document indique le type d'armes utilisées, les zones de départ probables des frappes, autant d'éléments qui pointent le régime syrien.

Plusieurs nations, à commencer par la France, prennent acte de ce tournant et les contours d'une intervention armée se précisent. François Hollande, le président français, s'exprime devant les ambassadeurs. « Le massacre chimique de Damas ne peut rester sans réponse, et la France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents ».

Une réponse internationale avortée

Mais la ligne rouge, fixée par l'allié américain un an auparavant, semble s'être estompée. Washington ne garantit plus son intervention en cas d'attaque chimique en Syrie. Officiellement, il s'agit de favoriser une solution politique. Les opinions publiques sont échaudées par les précédents libyens et irakiens. Au Parlement britannique, un vote crucial pour une intervention militaire est rejeté.

De leur côté, les alliés de Damas serrent les rangs, à commencer par la Russie. Moscou sauve le régime de Bachar el-Assad. Il lui fait signer la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. Damas s'engage à démanteler son arsenal, une promesse jamais suivie d'effet. Il faudra attendre 2017 et de nouvelles attaques chimiques par le régime pour qu'un président américain, Donald Trump, frappe Damas. Mais le régime syrien tiendra sept ans de plus. Les attaques chimiques de la Ghouta ont donné lieu à plusieurs mandats d'arrêt en Europe contre des personnalités du régime syrien, dont Bachar el-Assad. Mais la justice se fait encore attendre pour les victimes et leurs familles, douze ans après les faits.

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