Questions d'environnement

Pourquoi certaines bonnes nouvelles environnementales ont-elles des effets pervers?

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Le trou dans la couche d'ozone diminue grâce à l'engagement de tous les pays de la planète. Revers de la médaille : cette « guérison » augmente le réchauffement climatique. Petit tour d'horizon de quelques progrès environnementaux parfois contre-productifs.

La terre vue du ciel. (Image d'illustration)
La terre vue du ciel. (Image d'illustration) © Getty Images/EyeEm/Bernt Ove Mos
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Les bonnes nouvelles sont rares, et une bonne nouvelle est tombée mardi à l’occasion de la Journée internationale pour la préservation de la couche d’ozone : elle « guérit », a annoncé le patron des Nations unies António Guterres. Le trou dans la couche d’ozone, observé à la fin des années 1970, rétrécit. La couche d'ozone, qui nous protège des rayons ultraviolets (sans elle, il n'y aurait de vie sur Terre que dans les océans), devrait ainsi retrouver son état des années 1980 au plus tôt autour de 2040. Et c’est grâce notamment au protocole de Montréal, signé en 1987, l'engagement de tous les pays de la planète à bannir, dans l'industrie, les gaz responsables du trou. Il s’agit là d’une des rares politiques environnementales internationales couronnées de succès. Comme quoi, quand on veut, on peut…

Mais, on s'en est aperçu assez récemment, la réduction du trou de la couche d'ozone accroit le réchauffement climatique, parce qu'elle piège la chaleur dans l'atmosphère. Est-ce pour autant une raison de regretter le protocole de Montréal ? Bien souvent, il y a un mal pour bien. Rien qu'aux États-Unis, une étude a montré que près de 450 millions de cancers de la peau seront ainsi évités en un siècle. Et pour le réchauffement climatique supplémentaire, on sait ce qu'il faut faire : diminuer massivement nos émissions de CO2.

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Moins de kérosène, plus de voyageurs

On observe d’ailleurs d’autres effets pervers dans des politiques publiques environnementales. Dans le transport maritime par exemple. Pour remplacer le fuel, les bateaux naviguent de plus en plus au gaz naturel liquéfié (GNL). C'est moins de pollution.

Revers de la médaille, on s'est rendu compte qu'il y avait des fuites de méthanes. Les navires laissent dans leur sillage des nuages de ce gaz encore plus climaticide à court terme que le CO2. Est-ce une raison pour regretter le bon vieux fioul rempli de particules fines ? Non, là encore, on sait ce qu'il faut faire : réduire massivement nos émissions de gaz à effet de serre.

Des progrès contre-productifs, on en trouve aussi dans le transport aérien. L'aviation a réussi en diminuer de 15 % à 20 % sa consommation de kérosène. Grâce à ces économies de carburant, les compagnies peuvent baisser leur prix. Des billets moins chers, c'est davantage de voyageurs. Résultat, le gain climatique espéré est nul, le secteur aérien continue d'émettre toujours plus de CO2. Mais on sait ce qu'on peut faire ; décider de moins prendre l'avion, pour éviter cet effet rebond.

Le paradoxe de Jevons

L’effet rebond est un phénomène observé par un économiste britannique pendant la révolution industrielle, William Jevons, qui a donné son nom au paradoxe de Jevons. Il s'était rendu compte que les progrès réalisés dans les machines à vapeur, qui fonctionnaient avec moins de charbon, ne conduisaient pas à une baisse de la consommation globale de charbon, bien au contraire. Une amélioration technologique simule la croissance et donc simule la consommation d'énergie.

Un phénomène observé aussi dans l’éclairage nouvelle génération. Les ampoules led consomment 5 à 10 fois moins d'électricité. Résultat, on en met partout, on éclaire davantage. Les bonnes vieilles affiches publicitaires sont remplacées par des LED. La facture d’électricité ne baisse pas et la pollution lumineuse augmente. O

n pourrait aussi parler de la climatisation, parfois employée pour s'adapter au réchauffement climatique. Sauf qu'elle participe au réchauffement climatique. De même pour les barrages hydroélectriques, qui produisent une énergie renouvelable : ils ont des conséquences sur l'environnement, la biodiversité, quand des paysages disparaissent sous des immenses retenues d'eau. Ou les éoliennes, mortifères pour les oiseaux.

La vie se résume à des choix, et rarement un choix n'est parfait, sinon le choix serait vite fait. La question est presque philosophique : que fait-on du progrès ? Comme disait l'adage, on n'arrête pas le progrès, mais le progrès a encore des progrès à faire.

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