Kenya: après l'horreur de la secte Mackenzie, l'encadrement des cultes fait débat
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Au Kenya, 133 dépouilles ont été exhumées dans la forêt de Shakahola fin avril. Elles sont présumées être celles de fidèles d’une secte appelés à jeûner pour « rencontrer Jésus ». À sa tête, le pasteur autoproclamé Paul Mackenzie Nthenge, aujourd’hui en détention. Un autre pasteur, Ezekiel Odero, a aussi été arrêté avant d'être relâché contre le paiement d'une caution. Ces deux cas ravivent le débat autour de l’encadrement des cultes au Kenya.

Sur YouTube, n'importe qui peut regarder en direct Ezekiel Odero prêcher devant des centaines de fidèles. Très populaire, l'Église de ce télévangéliste n'est qu'une parmi des milliers au Kenya. Le pays, profondément religieux, connaît une prolifération des cultes. Un essor qui s’accompagne de quelques dérives, allant des abus financiers aux discours extrêmes.
« Il est difficile de lutter contre cette prolifération, car la Constitution de 2010 est très claire : le Kenya protège la liberté de culte et la liberté d’association, relève Stephen Akaranga est professeur en études religieuses à l’Université de Nairobi. Il faudrait en théorie que tous ces mouvements religieux soient mieux encadrée, mais dans ce contexte, qui va oser prendre des actions fermes à leur encontre ? »
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D'autres églises sous surveillance
D’après la loi kényane, les Églises doivent se déclarer auprès de l’État. Mais les contrôles manquent et les autorités n’arrivent pas à suivre les demandes. Plusieurs organismes religieux appellent l’État à leur déléguer la tâche. C’est notamment le cas du Conseil national des Églises au Kenya, une organisation qui regroupe plusieurs Églises chrétiennes. « C’est possible qu’il y ait d’autres Mackenzie, prévient le révérend Chris Kinyanjui, secrétaire général de l'organisation. Plusieurs pasteurs ont déjà été signalés. Il est donc temps de mettre en place un système d’autorégulation qui nous permettrait de surveiller toutes ces Églises. Nous sommes les mieux placés pour nous contrôler, nous savons qui sont les mauvais élèves et qui sont les bons. D’autres professions le font, les organisations religieuses peuvent mettre en place un système d’autodiscipline. Mais il faudrait pour cela que chaque Église soit rattachée à une organisation-mère. »
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Plusieurs tentatives d’imposer un encadrement plus strict ont été vivement contestées par le passé. Notamment par les organismes religieux, très influents au Kenya. « Il n’est pas possible de séparer le politique du religieux au Kenya, observe encore le révérend Chris Kinyanjui. Cela pose un vrai conflit d’intérêt, c’est certain, car la majorité de nos politiques font partie d’un mouvement religieux et entretiennent des relations proches avec certains leaders religieux. Mais il me semble que dans le contexte actuel, celui du massacre de Shakahola, il faut arriver à passer outre ces conflits d’intérêts. »
Le président William Ruto vient justement d’annoncer la mise en place d’un groupe de travail. Cette commission est chargée de formuler des pistes d’actions pour éviter les dérives sectaires de certains mouvements religieux.
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