Reportage Afrique

Soudan du Sud: à Bentiu, face à la montée des eaux, la lutte des femmes pour la survie [2/3]

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Le Soudan du Sud est l’un des pays les plus durement touchés par le changement climatique. Le pays subit des inondations depuis quatre ans, provoquant le déplacement de plus d’un million d’habitants, qui ont perdu leurs moyens de subsistance traditionnels. Dans la capitale de l'État d’Unité, Bentiu, les troupeaux ont été décimés et les champs sont toujours recouverts d’eau. Pour nourrir leurs enfants, les Soudanaises vont dans l'eau, prennent des risques considérables pour ramasser des nénuphars et coupent du bois. 

Nyagai Ter, femme résidente du camp de déplacés accolé à la base de l'ONU à Rubkona, près de Bentiu, ramasse et brise du bois pour le revendre pour survivre.
Nyagai Ter, femme résidente du camp de déplacés accolé à la base de l'ONU à Rubkona, près de Bentiu, ramasse et brise du bois pour le revendre pour survivre. © Florence Miettaux/RFI
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Avec notre correspondante de retour de Bentiu,

Sur la digue qui entoure le grand camp de déplacés accolé à la base de l’ONU à Bentiu, les bras se relaient pour décharger les canoës en provenance de la forêt inondée.

Une femme coupe du bois. « Je m’appelle Nyagai Ter. J’ai 37 ans et sept enfants ». La mère de famille vend du bois de chauffe pour gagner sa vie, un travail éreintant. « Je vais en canoë jusqu’à l’endroit où il y a encore des branches aux arbres. Je les coupe à la hache, les mets dans le canoë et je les ramène ici pour les vendre. Ça me permet d’acheter de la nourriture à mes enfants. C’est très fatigant, mais je n’ai pas le choix, je fais ça pour survivre. »

Quand les rations alimentaires du Programme alimentaire mondial s’arrêtent, comme c’était le cas en septembre et octobre, les femmes de Bentiu se démènent pour trouver de quoi nourrir leurs familles. Les nénuphars, dont le bulbe séché est transformé en farine, permettent de tenir. Encore faut-il s’aventurer dans l’eau pour les cueillir.

Une situation dangereuse pour les mères

Mary Nyaluony, une représentante des déplacés, insiste sur les nombreux risques auxquels il faut faire face. Elle se souvient du cas de cette femme dont le petit stand sur le marché en bord de route avait été emporté en août 2022, lorsque la digue a rompu. « Elle essayait de sauver ses affaires alors que l’eau était en train de tout emporter, lorsqu’elle a été mordue à la jambe par un serpent qu’on ne connaissait pas jusqu’ici. Et aujourd’hui, sa jambe est paralysée. »

Mary Nyaluony n’en peut plus de voir que ces inondations se prolongent dans le temps. « On pensait que ça allait durer un an, mais ça fait déjà 3 ou 4 ans, et l’eau ne baisse pas ! C’est un cauchemar pour nous, les mères. On perd espoir de voir la situation s’améliorer. »

Il est loin le temps où, se souvient Martha Nyayieya, « la vie était confortable ». La mère de sept enfants, déplacée en 2021 par les inondations, avait 22 vaches et des chèvres, et ne dépendait pas de l’aide humanitaire. Mais aujourd’hui, elle n’a pas d’autre choix.

« Je veux faire passer un message aux humanitaires et à l’ONU. Il faut qu’ils nous aident. Car nous n’avons pas accès à la nourriture. Nous n’avons pas de terres à cultiver, pas de travail, pas d’argent. Nous souffrons beaucoup », déplore-t-elle.

Mais les fonds nécessaires à la réponse humanitaire au Soudan du Sud sont en baisse, avec seulement 54% de la somme mobilisée en 2023.

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