Reportage Afrique

Sénégal: la consternation et la tristesse de Mbour après le nouveau naufrage d'une embarcation

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Que faire pour empêcher des personnes de monter à bord de pirogues au Sénégal afin de tenter de gagner illégalement l'Europe ? C'est souvent au péril de leur vie, comme dimanche 8 septembre 2024, après le chavirement d’une embarcation avec à bord plus d'une centaine de Sénégalais. Bilan : au moins 39 morts et de nombreux disparus. Tous étaient originaires de la ville de Mbour, d’où est partie la pirogue. Notre correspondant s’est rendu dans les quartiers de la ville qui ont payé le plus lourd tribut.

Des membres de la famille, des amis et des membres de la communauté se rassemblent le long de la plage en attendant que les équipes de recherche et de secours retrouvent les survivants et récupèrent les morts après le naufrage d'une pirogue transportant plus d'une centaine de migrants la nuit précédente, à Mbour, le 9 septembre 2024.
Des membres de la famille, des amis et des membres de la communauté se rassemblent le long de la plage en attendant que les équipes de recherche et de secours retrouvent les survivants et récupèrent les morts après le naufrage d'une pirogue transportant plus d'une centaine de migrants la nuit précédente, à Mbour, le 9 septembre 2024. AFP - JOHN WESSELS
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Thiocé est à environ 2 kilomètres de la plage où les corps repêchés en mer ces derniers jours ont été ramenés. La vie de quartier y reprend progressivement. À côté d'une route fréquentée, une quinzaine de jeunes discutent. Certains portent des lunettes de soleil, afin de cacher leurs yeux rougis par les larmes.

Dans le chavirement de la pirogue, Serigne Man Daow a perdu son frère, qui n'avait prévenu personne de son départ. Mais le jeune homme n'a aucune peine à expliquer ce qui a motivé son frère : « Les jeunes partent parce qu'ils n'ont pas ce qu'ils veulent ici, dans leur propre pays. Tu te lèves chaque jour et affrontes des situations où tu ne peux pas trouver de solution. Ton travail, quand tu en as un, ne te permet pas de soutenir ta famille. Les jeunes qui meurent sont de braves personnes. Leur seul tort, c'est de vouloir trouver des solutions. Ils voulaient réussir, mais le destin est trop difficile. »

À Guinaw Rail, l'autre quartier de Mbour dont étaient originaires de nombreuses victimes, les familles aussi se rassemblent pour prier. Khady Bébé a perdu deux petits neveux : « C'est très dur, tous les espoirs de leur mère sont brisés. En tant que parents et grands-parents, notre souhait était d'assister à leur mariage, pas à leur enterrement. Nous souffrons tous. »

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Empêcher les départs 

« Toute la ville est en deuil », affirme Mamadou Thiam, qui regrette le peu d'action des autorités sur le sujet : « L'État n'a jamais réagi, on est abandonnés et impuissants la situation. Il n'y a pas de travail. En attendant, il faut bloquer les départs de ces jeunes. »

À ses côtés, Baba Diop, dont plusieurs membres de la famille étaient à bord de la pirogue. Pour lui, la responsabilité vient aussi des pays qui donnent des visas au compte-goutte aux jeunes : « Les ambassades ne délivrent pas de visas. Il faut que les pays d'Europe délivrent un certain nombre de visas pour donner un peu d'espoir à ceux qui s'y rendent. »

À Mbour, mercredi 11 septembre, le président Bassirou Diomaye Faye a assuré que le gouvernement travaille d'arrache-pied contre le chômage et a promis d'accentuer la lutte contre les passeurs. Les habitants, ici, attendent de voir les résultats.

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