Les «Ailes du désir», l'opéra qui prend son envol vers le Berlin des années 80
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Film culte du cinéma allemand et prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 1987, Les Ailes du désir de Wim Wenders reprend son envol sous la forme d'un opéra, le premier créé par la Co[opéra]tive. Cette association de six scènes françaises, engagée à produire et diffuser ses productions loin des métropoles, a passé commande à un jeune compositeur franco-tunisien. Othman Louati, 34 ans, signe son premier opéra associé à l'univers des marionnettes de Johanny Bert.

Deux anges perchés sur les toits de Berlin recueillent les pensées intérieures des humains, à la recherche de sens et de beauté. Jusqu'à ce que l'un se coupe les ailes et renonce au ciel par amour pour une trapéziste. Ce conte allégorique Les Ailes du désir, chef-d'œuvre du cinéma allemand tourné seulement deux ans avant la chute du mur, livre le matériau rêvé pour un opéra. Ici, les Berlinois sont représentés par des marionnettes d'une humanité émouvante et fragile avec des crânes ouverts, scintillants et dorés.
Pour recréer la magie sur scène, Grégory Voillemet illustre le Berlin des années 80 par des rideaux transparents dans une mise en scène épurée, tout en ombre et lumière : « Le film de Wim Wenders, c’est un fleuve de deux heures. C’est d’abord un symbole ; il y a un côté documentaire de Berlin et ce sont ces films contemplatifs qui nous aident à aller plus loin vers la pensée. Il y a le regard du poète sur le monde, il y a un regard aussi philosophique. Donc, l'opéra commence par cette page blanche et ça devient le ciel des anges. »
Une œuvre politique
L'ange principal est incarné par une femme, la voix divine et charnelle de la soprano guyanaise Marie-Laure Garnier : « Les anges n'ont pas de genres et c'est là toute la beauté aussi de cette réadaptation. Damielle est l’ange qui voit le monde avec des yeux d’émerveillement et dans la vocalité, on assiste tout au long de l’opéra à son évolution entre ciel et terre ; donc elle passe des graves aux aigus et des aigus aux graves très rapidement. C’est une musique qui appelle une certaine légèreté et en même temps, on a vraiment besoin d’être ancré dans son corps pour pouvoir trouver de l’élasticité, de chanter tous ces airs extrêmement lyriques et parfois murmurés. Il y a un mélange entre lyrique, pop, rock et on sent cette humanité. »
Ces Ailes du désir lyriques prennent un envol encore plus poétique grâce à la musique du franco-tunisien Outhman Louati. À peine né au moment de la chute du mur en '89, il est pleinement conscient de la dimension politique de l'œuvre : « En pleine résurgence du conflit israélo-palestinien, parler de la Shoah, ce n'est pas neutre et puis il y a des murs partout aujourd’hui : à Gaza, en Ukraine, en Corée, au Mexique, c’est une frontière terrible qui est vieille comme l’humanité. Le mal, c'est la séparation. Et les anges sont là pour aller au-dessus des murs. »
Avec une musique subtilement nourrie de touches électroniques et circassiennes qui donne des ailes : « C’est une louange, ça chante l’existence. C’est un cri d’amour, mais un cri d’amour à l’égard de l’humanité ; on en a besoin aujourd’hui. »
► Les Ailes du désir, création mondiale de la Co[opéra]tive, continue sa route à travers la France jusqu'au 24 mai 2024, de Dunkerque à Tourcoing en passant par Besançon le17 et 18 janvier, puis Compiègne, Nantes et Rennes.
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