Le festival Électropicales à Saint-Denis de La Réunion: une célébration de la culture créole
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La 17e édition des Électropicales s'est terminée dans la nuit de samedi à dimanche 12 octobre à Saint-Denis de La Réunion. Considéré comme le plus grand rendez-vous de musiques électroniques et hip-hop de l'océan Indien, le festival a rassemblé plus de quarante artistes locaux, régionaux et internationaux, pour quatre soirées intenses au cœur de la capitale réunionnaise. Entre maloya réactualisé, techno-punk, rap, bouyon, et bien d'autres styles encore, Les Électropicales ont offert un panorama musical riche et métissé, à l'image de l'île intense.

Ces derniers jours, le quartier du Barachois, d'ordinaire assez calme, s'est transformé en un véritable théâtre sonore et visuel. Fondateur et directeur des Électropicales, Thomas Bordese vise à créer un espace où l'on se sent libre, en sécurité et en lien :
« Je vais répéter ce qu'un artiste m'a dit quand il était venu : "Ton festival sent l'amour". Peut-être que c'est l'amour d'une équipe qui bosse dessus pendant un an, qui se donne à fond pour faire des choses belles, pour transformer un espace historique : le Barachois, avec la mer à côté, les arbres centenaires... Il le transforme en un endroit qui est méconnaissable pour les Dionysiens et les Réunionnais. C'est un point d'entrée de La Réunion qui est quand même très emblématique. On sublime le Barachois, j'espère en tout cas. »
Sur scène, les boucles répétitives des machines électroniques s'entremêlent naturellement aux rythmes de l'océan Indien chez ces artistes de La Réunion, de Maurice ou de Mayotte. Pour le pionnier de l'électro-maloya, Jako Maron, cette fusion n'est pas un simple choix artistique, c'est un acte de mémoire :
« Le maloya, c'est une voix qui vient de loin, c'est le seul témoignage qu'on ait musicalement, qui nous donne un peu les sentiments qu'ils ont pu ressentir. Je parle de ceux qui étaient avant nous, sur l'île, de l'histoire de l'esclavage. On n'a pas de livre. Ils n'ont pas fait des tableaux. Ils n'ont rien fait. Ce sont des gens qui ont tout donné. Et après, ils n'ont même pas une tombe, pour beaucoup. C'est la seule résonance qui reste de leur voix. Cette résonance, cette voix, moi je veux la faire résonner dans le monde entier. Je joue du maloya, la musique qui vient de l'esclavage. On entend leurs souffrances, leur fierté dedans, c'est ça le combat pour moi. »
Chez les rappeurs, même constat : les racines refont toujours surface. N'Dji, voix montante du rap réunionnais, célèbre sa créolité dans ses clips comme dans ses textes. Il raconte :
« C'est très naissant le rap local, le rap créole. On est donc dans un mimétisme du rap français. Moi, j'écoutais beaucoup MC Solaar. Ils chantent en français. Quand tu veux t'approprier un peu plus ta façon de t'exprimer, tu ne mens pas, donc tu t'exprimes avec les codes du milieu dans lequel tu as grandi. Naturellement, tu transfères cela dans le rap créole. Je ne suis pas le plus grand puriste du maloya rap, mais c'est quelque chose qui me parle et dès que j'ai l'occasion d'introduire un peu de maloya dans ma musique, j'en mets. »
Cette année encore, Les Électropicales s'affirment comme un festival capable de bâtir des ponts entre les continents, les époques et les identités. Une célébration sonore où le passé et le futur dialoguent sous les palmiers, au rythme des basses.
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