Reportage international

Rideau sur les JO et le virus

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Rideau sur les Jeux olympiques de Tokyo, dans quinze jours ce sont les Paralympiques qui débuteront. En attendant, la situation sanitaire s'est terriblement dégradée dans la capitale japonaise, qui enregistre un nombre sans précédent de contaminations. D'où, cette question évidemment : les Jeux ont-ils contribué à la propagation du coronavirus ? Non, répètent en boucle les organisateurs, le Comité international olympique et le gouvernement. Mais, dans le monde médical, les avis sont nettement plus nuancés.

Une soignantes japonaise reçoit une dose de vaccin contre le Covid-19 le 17 février 2021 à Tokyo.
Une soignantes japonaise reçoit une dose de vaccin contre le Covid-19 le 17 février 2021 à Tokyo. AP - Behrouz Mehr
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400 000 tests PCR environ ont été pratiqués tout au long des Jeux. Auprès des 50 000 étrangers qui y ont pris part ou y ont assisté, mais aussi des Japonais qui les ont encadrés : ceux qui travaillaient au Village olympique, par exemple. Au total, seuls quelques centaines de ces dépistages ont été positifs.

Les organisateurs en déduisent que l’absence de contacts entre les participants aux Jeux et la population locale – la « bulle olympique », autrement dit – a permis d’éviter que le virus se propage dans la ville au départ et à cause des JO.

Mais pour le Dr Masaharu Yagi, du centre hospitalier Shôwa, à Tokyo, le délai d’incubation du virus rend cet auto-satisfecit prématuré :

« On ne pourra faire le bilan sanitaire de ces Jeux que dans quinze jours, pas avant. Le pire est à venir, selon moi : je suis très inquiet »

Autre problème : les services médicaux sont si débordés à Tokyo qu’ils n’ont plus le temps de mettre au jour les itinéraires de contagion. Des contaminations dues aux JO peuvent donc très bien n’avoir pas été détectées.

Et puis, de toute manière, pour ces deux épidémiologistes, il ne fait pas de doute que les Jeux ont indirectement contribué à la détérioration de la situation sanitaire :

« C’est vrai : à ce stade en tout cas, ce dispositif de « bulle olympique » paraît avoir été efficace. Il n’empêche que la tenue des Jeux a envoyé un mauvais signal à l’opinion. Beaucoup de gens ont baissé la garde, se disant que la situation sanitaire n’était pas si grave que cela puisqu’on organisait un tel événement. Les autorités auraient dû dire beaucoup plus clairement à la population qu’elle devait continuer à redoubler de vigilance pendant les Jeux »

« Des milliers de médecins et d’infirmiers ont été réquisitionnés pour encadrer les Jeux. Or, la plupart des hôpitaux étaient déjà en sous-effectifs. Cela a encore accru la charge de travail des soignants et a nui au suivi des patients. En plus, faute de personnel en nombre suffisant, des malades du Covid n’ont pas pu être hospitalisés »

À Tokyo en ce moment, les soignants ne savent plus où donner de la tête, à l’image de ces médecins hospitaliers :

« Depuis l’apparition du virus, on travaille énormément mais, là, avec à la fois, la cinquième vague, le variant Delta et ces Jeux qu’il a fallu encadrer, cela a dépassé tout ce qu’on avait imaginé. Des collègues sont si épuisés qu’ils finissent par tomber malades »

« Le nombre de patients augmente sans cesse, leur âge moyen diminue, et on a de plus en plus de jeunes qui sont dans un état très critique »

« On est submergés de malades âgés de moins de 40 ou 50 ans qui n’avaient pas encore été vaccinés et qui ont donc contracté le variant Delta »

La capitale japonaise dénombre désormais cinq fois plus de contaminations quotidiennes qu’il y a quinze jours, quand les Jeux ont débuté.

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