En Corée du Sud, le tatouage est considéré comme un acte médical
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La pratique du tatouage est réservée aux médecins dans le pays. Mais un mouvement politique et citoyen envisage de modifier la loi pour régulariser la situation des dizaines de milliers de tatoueurs en Corée du Sud qui exercent encore leur art illégalement. Un paradoxe alors que la tendance au tatouage chez les Sud-Coréens est visible à l’œil nu lorsque l’on se promène dans les rues de Séoul.

De notre correspondant à Séoul, Nicoals Rocca,
En plein cœur du quartier branché de Mapo, une maison à brique rouge détonne au milieu des immeubles gris. Baek Song-an nous fait le tour des trois étages qui composent le studio. Plusieurs salons, avec différentes tables, sur l’une d’entre elles au sous-sol, une jeune femme se fait tatouer. Difficile de deviner que cette scène en apparence banale est passible de 7 500 euros d’amende et de deux ans d’emprisonnement.
« En Corée du Sud, les clients ne réalisent pas que c’est illégal, explique Baek Song-an. Habituellement, ils nous contactent sur Instagram, on discute du design et parfois ils se déplacent ici et ensuite on les tatoue. Pour nous, les problèmes apparaissent généralement lorsqu’il y a un désaccord avec le client et qu’il veut porter plainte par exemple. »
Celui qui se fait surnommer Baek-Sa, soit « 104 » en coréen exerce son métier depuis 16 ans. « Officiellement, je suis sans emploi, comme beaucoup d’autres tatoueurs. Les clients nous règlent en argent liquide habituellement et on ne peut pas le déclarer, on ne paie pas d’impôts. Mais toute la préparation au tatouage est déclarée au sein d’une entreprise de design. »
« On se prévient et on fait très attention »
Autrefois, l’image du tatouage était liée aux mafieux et à ceux qui refusaient le service militaire. Désormais, on estime à près d’un million le nombre de Sud-Coréens tatoués. Pourtant, les artistes restent une cible pour les autorités.
« Personnellement, je n’ai jamais eu de problèmes directs avec la police à propos de mon travail. Mais j’ai entendu beaucoup d’histoires d’autres tatoueurs, raconte Baek Song-an. En Corée du Sud, il y a certaines périodes où les policiers ciblent particulièrement les tatoueurs. Donc, dès qu’on a l’information, on se prévient et on fait très attention. Souvent, par exemple, ils prêteront plus attention à ceux qui tatouent les personnes les plus jeunes. »
Projet de loi sur la liberté de tatouer
Mettre fin au tabou dans un pays qui floute encore les tatouages à la télévision, c’est l’objectif de Ryu Ho-jeong. La députée du parti de la Justice est apparue le dos nu rempli de tatouage devant l’Assemblée nationale. Après avoir créé la polémique, elle cherche à faire passer une proposition de loi.
« Le point central de la loi s’appelle "Tatoo Up", le tatouage comme travail. Elle offrira la liberté de tatouer aux artistes et veillera aussi à la santé des Sud-Coréens, explique Ryu Ho-jeong. Si le texte passe, alors il y aura des salons qui seront enregistrés pour effectuer des tatouages et des artistes habilités à le faire. Cette loi permettra aussi de garantir que les studios respecteront les mêmes critères sanitaires que d’autres commerces. » Le texte sera soumis au vote d'ici à la fin de l’année 2021.
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