Reportage international

Guerre en Ukraine: à Boutcha, des enquêtes pour documenter les possibles crimes de guerre

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Les images de Boutcha ont choqué le monde entier et ont poussé la communauté internationale à se mobiliser pour ouvrir plusieurs enquêtes afin d’établir que l’armée russe a potentiellement perpétré des crimes de guerre en Ukraine.

Des volontaires chargent les dépouilles de victimes de Boutcha pour être examinées dans une morgue, le 13 avril 2022.
Des volontaires chargent les dépouilles de victimes de Boutcha pour être examinées dans une morgue, le 13 avril 2022. © AP/Rodrigo Abd
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De nos envoyés spéciaux dans la région,

Les survivants de l’occupation par les russes de la ville de Boutcha ont tous des souvenirs brutaux en tête. Près d’un charnier de l’église Saint-Andrew, Oleg n'en revient toujours pas de s’en être sorti en vie.

« J’ai vu des enfants de 4 et 10 ans, brûlés vifs avec leur mère », raconte Oleg. « Comment peut-on digérer ça ? J’ai vu le corps déchiqueté de mon voisin devant moi, il lui manquait un poumon et les Russes ne nous ont pas laissé prendre son corps pour l’enterrer comme il le faut. Quand je ferme les yeux maintenant, je ne vois que ça ».

Des preuves récoltées au fur et à mesure

C’est sous un ciel gris, le vent fouettant les sacs noirs qui contiennent les corps des victimes, que la procureure générale d’Ukraine, Iryna Venediktova, s’est rendue à Boutcha. Elle vient établir que des crimes de guerre se sont déroulés dans la petite ville non loin de Kiev.

« Boutcha a des séquelles de tous les crimes de guerre, torture, abus sexuels, infrastructures et habitations civiles bombardées », décrit Iryna Venediktova. « Comme Borodyanka, c’est une ville sans structures militaires, et il n’en reste rien. On peut témoigner d’un grand nombre de crimes de guerre dans la région de Kiev et nous pouvons les qualifier de crimes contre l’humanité », ajoute-t-elle.

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Les preuves sont récoltées au fur et à mesure par les citoyens eux-mêmes qui disposent d’outils à portée de main pour répertorier les crimes de guerre, comme nous l’explique une députée ukrainienne, Lesia Vasylenko. 

Il y a une application smartphone pour dénoncer les cas de tortures, d’abus, les attaques contre des cibles civiles comme les écoles ou encore les hôpitaux… Tout le monde a un smartphone maintenant, les gens peuvent envoyer leurs photos d’une clinique bombardée par les Russes alors même que la guerre se poursuit. Comment les Russes pourront affirmer que tout est fabriqué lorsqu’une vingtaine de personnes ont des photos du même événement, d’angles différents, de troupes russes visant des civils ? 

« Dans la région de Kiev, on voit des potentiels crimes de guerre à chaque coin de rue »

Des enquêteurs internationaux sont également arrivés afin de procéder à des enquêtes approfondies sur le terrain. C’est le cas de Belkis Wille, chercheuse senior auprès de la division Crises et conflits de l’organisation Human Rights Watch. 

« Ce qui est frappant dans certaines régions du pays, c’est l’ampleur de ces abus. Rien que dans la région de Kiev, on voit des potentiels crimes de guerre à chaque coin de rue, autour de tous les immeubles, et c’est assez remarquable », constate Belkis Wille. « L’autre chose qui démarque ce conflit, c’est qu’il n’y a jamais eu dans l’histoire autant d’opportunités d’obtenir des preuves, dans le cadre des mécanismes judiciaires. C’est vraiment unique. »

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Le gouvernement russe persiste et signe, tout est faux et fabriqué par Kiev. Mais les preuves accablantes s’accumulent et les Ukrainiens espèrent qu’elles serviront devant une cour pénale internationale.

© RFI

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