En visite en Chine, E Macron veut encourager Pékin à jouer un rôle dans le conflit en Ukraine. Mais la visite d’État de trois jours de Xi Jinping en Russie a montré Pékin et Moscou alliés contre l’Occident. En Russie, l’enseignement du chinois a lui fortement progressé depuis un an.

De notre correspondante à Moscou,
Fin d’après-midi dans une école de langues dans la banlieue est de Moscou. C’est l’heure de l’effervescence : on entre, on sort, on attrape un gobelet à la machine à café avant d’ouvrir ses cahiers dans une des nombreuses salles. Le logo de cet établissement d’un réseau de 12 dans l’agglomération a beau préciser « anglais, allemand, espagnol », depuis un an, ce qui résonne davantage dans les salles de cours, y compris chez les plus jeunes élèves de Ekaterina, c’est le chinois.
« C’est intéressant de noter que ce sont les enfants eux-mêmes qui veulent apprendre le chinois, ils disent qu’ils ont vu des choses qui leur plaisent sur Internet. Des photos de la Chine, de la publicité. La culture chinoise est très promue, et il y a même beaucoup de dessins animés liés à la Chine qui sortent en Russie. Et les enfants les regardent, ils aiment ça aussi. Ils veulent la même chose », nous explique cette professeure de chinois et espagnol depuis quatre ans
Une demande croissante de la demande de cours de chinois
En douze mois, toutes les plateformes occidentales comme Facebook, Instagram, YouTube ont été bannies. Et la Russie intensifie depuis début 2023 sa lutte contre les VPN qui permettent d’y accéder. Quant au cinéma, Hollywood s’est retiré du marché dès début mars 2022. Résultat : un large espace s’est ouvert pour le soft power chinois.
Pour Anna Peunova, vice-directrice de l’école, les conséquences ont été immédiates : « Si on compare mars de l’année dernière et mars de cette année, nous avons une croissance de la demande de cours de chinois de plus de 60 % », explique-t-elle. « De plus, tous nos professeurs de langue chinoise ont un niveau assez élevé et ils ont tous effectué au moins un stage en Chine. On ne peut pas en dire autant de tous nos professeurs d’anglais. »
Et cela ne va pas s’arranger. Les portes des universités européennes sont fermées quand celles de la Chine sont grandes ouvertes aux Russes. Même chose pour le marché du travail : en un an, les annonces demandant des compétences en chinois ont explosé. L’économie russe a entamé ce « pivot vers l’Asie » que Vladimir Poutine vante tant, et les sites de petites annonces ont vu exploser les offres de postes demandant une pratique du chinois.
La difficulté des adultes à rester assidus aux cours
Natalia, qui enseigne le chinois en ligne, a vu en un an le nombre de ses clients doubler. « Bien sûr, en raison des événements récents qui ont eu lieu au cours de l’année écoulée, il y a plus d’intérêt pour le chinois chez les adultes. J’ai eu ainsi le cas de quelqu’un qui a du mal à trouver un emploi parce que les entreprises européennes ont quitté le marché russe. Des profils comme ceux-là s'intéressent à la possibilité de faire des affaires avec la Chine et, par conséquent, se disent qu’il peut être très utile d'apprendre la langue. »
Un intérêt qui fait parfois long feu explique cependant Natalia. « Malheureusement, beaucoup de gens arrêtent d’apprendre la langue très rapidement », souligne-t-elle. «Beaucoup de gens pensent que c’est comme l’anglais, qu’ils vont étudier quelques mots pendant un moment, lire un peu de grammaire, et que tout sera facile. Je parle toujours de ces questions aux adultes qui travaillent déjà, je leur dis qu’apprendre la langue chinoise prend beaucoup de temps, qu’à cause des particularités de la langue, et notamment de l’alphabet, l'apprentissage de la langue est très difficile. Malheureusement, tout le monde n’a pas autant de temps à disposition et de nombreux adultes abandonnent ».
Motivés par l’emploi, souvent démotivés par la difficulté... Sur un total de 10 nouveaux inscrits au cours des derniers mois, il ne reste déjà à Natalia que quatre étudiants. Les employeurs russes qui ont besoin de sinophones rapidement, eux, s’arrachent les cheveux.

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