Japon: la riziculture en crise en raison du réchauffement climatique
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C'est la consternation dans les campagnes japonaises. Durant l'été, pendant plus de deux mois, la température a fréquemment atteint, voire a dépassé, les 40°C à l'ombre. À présent, les riziculteurs, effarés, constatent l'ampleur des dégâts causés par le réchauffement climatique. En ce mois d'octobre, mois de la récolte du riz au Japon, elle s'annonce catastrophique.

De notre correspondant à Tokyo,
Takuo Nakagawa, 82 ans, exploite plusieurs hectares de rizières non loin de Tokyo. Comme, auparavant, l'avaient fait son père et son grand-père. Mais cette année, l'octogénaire n'en revient pas : une telle récolte, il n'avait jamais connu cela.
« Ça a été terrible », lâche-t-il. « Normalement, le riz pousse dans une vingtaine de centimètres d'eau, mais là, il a fait tellement chaud en juillet et en août que le sol de mes rizières était complètement craquelé. Cela m'a rappelé les images que j'avais vues à la télé, dans le temps, à l'époque des grandes sécheresses au Sahel. Résultat : énormément de grains récoltés sont rabougris, décharnés. Ensuite, pour couronner le tout, en septembre, on a eu des pluies torrentielles. Tout a été inondé. Les plants ont donc pourri sur pied au lieu de mûrir et ça a donné des grains moisis. » Les riziculteurs vont donc payer au prix fort cette mauvaise récolte.
Du riz qui finira pour le bétail
Trois catégories de riz existent au Japon. Le riz labellisé n°1, le meilleur, se vend 30% plus cher que les riz de catégories 2 et 3, de moins bonne qualité. Sauf qu'on trouvera peu de riz premium dans les magasins cet automne, selon ces deux inspecteurs de la division du ministère de l'Agriculture qui évalue la qualité des récoltes.
« D'habitude, 80 % environ du riz récolté est labellisé n°1, mais, cette année, ce pourcentage va s'effondrer : ce sera 20%, pas plus. C'est une gageure d'obtenir du riz premium dans de telles conditions climatiques », dit le premier inspecteur. « Beaucoup de grains récoltés sont minuscules ou biscornus. Donc, ce n'est pas dans les assiettes, mais dans des mangeoires qu'ils vont aboutir : on s'en servira comme fourrage pour le bétail », ajoute le second.
Été 2023, une année qui restera dans les annales
Cette détresse des riziculteurs fait la Une des médias et est très commenté sur les réseaux sociaux. Une mobilisation a même vu le jour en faveur de cette profession très aimée, comme en témoignent ces deux épouses de cultivateurs.
« On reçoit beaucoup de messages de sympathie. Les gens nous téléphonent pour nous dire : “Allez, courage ! On ne vous laissera pas tomber : on achètera votre riz, même s'il est un peu moins bon” », dit l'une. « Et puis, beaucoup plus que les années précédentes, le week-end, des bénévoles viennent nous donner un coup de main pour la récolte. On était à bout, donc ça nous fait vraiment chaud au cœur », poursuit l'autre.
L'été 2023 restera dans les annales, au Japon : trop chaud et trop sec, puis trop pluvieux. Mais il laissera aussi le souvenir d'un été doublement solidaire. En effet, avant de soutenir les riziculteurs, la population s'était mobilisée en faveur des pêcheurs qui sont frappés de plein fouet par la décision de la Chine d'interdire les importations de produits de la mer japonais depuis que, fin août, a commencé l'opération de rejet dans l'océan Pacifique des eaux de la centrale nucléaire de Fukushima.
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