C’est l’une des questions à laquelle tente de répondre l’hebdomadaire français Le 1 dans sa dernière édition consacrée à l’Afrique. Le journaliste Rémi Carayol avance le fait que « pour beaucoup en Afrique, la démocratie est synonyme de corruption, d’élections faussées et, surtout, de développement économique capté par une petite élite. Victimes des putschs, IBK au Mali, Mohammed Bazoum au Niger, Roch Marc Christian Kaboré au Burkina Faso, Ali Bongo au Gabon et Alpha Condé en Guinée ont tous un point commun, affirme Rémi Carayol : ils ont été mal élus, lors de scrutins tronqués par la force ou par la puissance de l’argent. L’élection n’est plus synonyme de légitimité. (…) Le problème, poursuit-il, est la manière dont la démocratie a été mise en œuvre sur le continent. »
Un changement d’ère historique
Et la France porte là une grave responsabilité… C’est ce qu’explique Antoine Glaser, autre journaliste spécialiste de l’Afrique, toujours dans l’hebdomadaire Le 1 : « la France a continué d’instrumentaliser en sous-main les pouvoirs africains, dit-il. (…) Au-delà des putschs, nous assistons à un changement d’ère historique. Il faut vraiment changer de cap. (…) Je rêverais d’un président français qui dirait un jour : "on a tant à apprendre de l’Afrique". Ça n’est jamais arrivé, pointe le journaliste. On continue de parler de la Françafrique. Quand parlera-t-on d’une Afrique-France ? Quand serons-nous prêts à apprendre des africains ? Bref, conclut Antoine Glaser, il va falloir commencer à savoir se taire. Ecouter, apprendre, comprendre, faire le contraire de ce qu’on a fait. Si ça advient, ça prendra quelques années… »
Enfin, dans son éditorial, l’hebdomadaire Le 1 pose la question suivante : « face à l’échec de l’idée démocratique, le continent n’aurait-il le choix qu’entre le djihadisme et les coups de force militaires ? »
Gabon : un coup d’État ? Non, une « libération ! »
Parmi les pays qui ont connu récemment un changement de pouvoir par la force, il y a donc le Gabon… Le nouveau maître du pays, le général Oligui Nguema s’exprime dans Jeune Afrique. « Ce que vous appelez chez vous un coup d’État, ici, au Gabon, nous le nommons une libération, affirme-t-il. L’enthousiasme des populations gabonaises en est la preuve, ainsi que l’adhésion de toutes les forces vives de la Nation. » L’objectif de la transition, poursuit-il, est « la restauration de nos institutions et de la dignité du peuple gabonais. Ensuite, la garantie des libertés fondamentales et de la libre expression du jeu démocratique. Enfin, le redressement économique de notre pays. »
Et puis à noter aussi cette remarque du général Oligui Nguema : « ce que je retiens de Monsieur Ali Bongo, c’est sa forte propension à déléguer et à créer autour de lui un cercle d’individus qui pensaient avoir raison sur tout mais qui n’ont rien fait de positif. »
Vague d’emprisonnements…
Justement, la purge se poursuit au sein de cercle… Hier, plusieurs personnalités clés du régime déchu d’Ali Bongo Ondimba ont été mises en examen et transférés à la prison de Libreville. Parmi elles, Noureddin Bongo Valentin, le fils de l’ex-président, avec comme chefs d’inculpation, pointe Jeune Afrique : « haute trahison contre les institutions de l’État, détournements massifs des deniers publics, malversations financières internationales en bande organisée, faux et usage de faux, falsification de la signature du président de la République, corruption active, trafic de stupéfiants. »
Ne pas croire au Père Noël…
Par ailleurs, la parole se libère au Gabon… C’est du moins ce qu’on peut lire sur le site Gabon Review : « déesse inconnue jusqu’au 30 août dernier, la liberté d’expression s’est imposée au sommet du panthéon gabonais depuis le coup d’Etat ou de liberté, selon la formule que l’on choisira. »
Mais attention, prévient l’universitaire Augustin Emane, cité par Gabon Review : si « ce vent de liberté insufflé par le coup d’État a libéré la parole et fait émerger de nombreuses revendications sociales jusque-là étouffées, il faut se garder de voir dans le nouveau pouvoir un "Père Noël", capable de satisfaire toutes les demandes. Une transition sociale s’impose, par le dialogue et la responsabilisation de chacun, pour éviter le risque de désillusions. »
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