Clea Broadhurst, journaliste à RFI: «Témoigner de la guerre en Ukraine, c'est gagner en humilité»

Journaliste au service international de RFI, Clea Broadhurst rentre tout juste d'une deuxième mission de reportage en Ukraine. De Kiev, la capitale, au cœur du Donbass, accompagnée de Jad El Khoury, ingénieur du son, elle a parcouru le pays durant quinze jours. Dans cet épisode, elle raconte la guerre qui se poursuit dans le Donbass et la multiplication des récits d'exactions commises sur des civils par des soldats russes. [Attention, cet épisode contient des témoignages difficiles qui peuvent heurter les plus jeunes.]

La procureure général d'Ukraine, Iryna Venediktova, visite une fosse commune à Boutcha, dans la périphérie de Kiev, le 13 avril 2022. © FADEL SENNA / AFP

Dans cet épisode de Témoins d'actu, Clea Broadhurst, explique les différences entre ses deux missions en Ukraine. La première fois, qu'elle y était allée, la guerre venait tout juste de commencer. Ce qui l'avait d'abord frappée en entrant par la frontière polonaise, c'étaient les milliers de personnes qui cherchaient à fuir. Elle était ensuite allée sur le front sud, à Odessa et Mykolaïv où les bombardements étaient incessants. « Lors de cette deuxième mission, dit-elle, nous sommes allés à Kiev et dans ses environs où plusieurs villes venaient juste d'être libérées. Nous avons suivi la procureure Iryna Venediktova, qui accompagnait une équipe française chargée d'enquêter sur de possibles crimes de guerre ». 

Les récits de violences commises par les soldats russes se multiplient. Clea et Jad ont rencontré un homme. Il s'appelle Konstantin. Grâce à son passeport kazakhstanais, il a pu traverser les checkpoints russes des villes assiégées autour de Kiev. Il a pu extraire plus de 200 personnes de sept villages différents. Beaucoup de ceux qu'il a sauvés, lui ont raconté ce qu'ils avaient subi. Des psychologues ont ensuite confirmé à Clea qu'ils s'attendaient dès le début de la guerre, à recevoir ce genre de témoignages, mais que les femmes et les hommes qui ont été victimes de viols et de tortures ont beaucoup de mal à en parler. 

Clea et Jad se sont aussi rendus dans le Donbass : « Nous venions de quitter Kiev où il n'y avait plus trop d'alertes de bombardements, mais là, il y avait des alarmes en permanence et on sent bien que les Russes ont concentré leur offensive dans ces territoires de l'Est ». Si 90 % de la population du Donbass a fui, 10 % des habitants sont restés : « Sur le trajet entre Kramatorsk et Sievierodonetsk, on ne croise que des villes fantômes. Les gens vivent la plupart du temps dans des bunkers. Une majorité d'entre eux y sont depuis le 24 février, date du début de la guerre, ils tentent de survivre et attendent que cela passe ». 

Clea conclut en disant qu'elle a été particulièrement touchée par les Ukrainiens. « En les écoutant, on gagne en humilité et notre métier, c'est de faire passer leurs messages. C'était important pour moi de retourner en Ukraine pour continuer de témoigner de ce qui se passe aujourd'hui dans ce pays ».

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