Depuis l'annonce le 21 septembre 2022 par Vladimir Poutine, le chef du Kremlin, d'une mobilisation partielle de sa population, les citoyens russes sont de plus en plus nombreux à vouloir échapper à la guerre. Quand certains fuient, d'autres contestent et manifestent. Un soulèvement populaire est-il possible ? Nous en discutons avec Denis Strelkov et Elsa Vidal, journalistes au sein de la rédaction en russe de RFI.

C'est Denis Strelkov qui ouvre le bal de cet épisode de Témoins d'actu. Le jour où nous avons enregistré, il rentrait de Finlande. C'est dans la ville de Lappeenranta, à la frontière avec la Russie, qu'il a appris l'annonce de Vladimir Poutine d'une mobilisation partielle des réservistes. Denis raconte qu'il a été témoin de l'afflux de citoyens russes côté finlandais. « La plupart des personnes que j'ai rencontrées étaient parties à la hâte, avec juste deux ou trois valises en laissant tout derrière elle ».
Pour tenter de répondre à la question de cet épisode, Elsa Vidal, explique : « On entend rarement des témoignages qui cherchent à exprimer une solidarité à l'échelle de la société russe. Les gens sont avant tout impliqués dans des stratégies pour se mettre à distance eux-mêmes, pour protéger les leurs. C'est le résultat de dizaines d'années d'actions des différents pouvoirs qui visent à isoler les individus et à leur faire perdre confiance ». « De cette manière, poursuit Elsa, vous construisez une volonté de vivre le plus loin possible du politique et vous empêchez l'établissement d'une solidarité et d'une croyance selon laquelle les citoyens peuvent se saisir de leur destinée collectivement ».
Comment expliquer que dans les images qui circulent, on voit très peu les autorités russes arrêter ces départs ?
« Pour que cette mobilisation fonctionne, explique Denis, Vladimir Poutine a tout intérêt à laisser partir ceux qui sont contre lui ». « Le calcul politique est assez simple, poursuit Elsa, mathématiquement, la base du régime va devenir beaucoup plus homogène. On aura, en quelque sorte, écrémé le peuple russe ».
Nous abordons la situation économique de la Russie, frappée par les sanctions européennes et son impact sur le quotidien des Russes. « Les sanctions combinées à un passage croissant de l'économie au service de la guerre vont toucher le quotidien des Russes. Mais cette société a vu par le passé des crises financières, si fortes qu'elle est préparée à ce genre de situation. Les Russes vont passer en mode survie ». Denis ajoute : « Il y a des entreprises ou des sociétés de services qui ont fermé au début de la guerre, mais très vite, des entrepreneurs ont comblé ce vide et font des affaires ».
La société russe s'adapte plus qu'elle ne se soulève contre le pouvoir, racontent nos deux confrères. « Nous sommes nombreux à espérer des changements, mais la réalité, c'est que le pouvoir russe est extrêmement opaque. Il y a des signaux faibles, par exemple et, c'est inédit, des attaques contre des commissariats, (NDLR : qui enregistrent les personnes volontaires où qui sont convoquées pour la mobilisation) mais je ne sais pas, dit Elsa, si l'on peut, pour autant, aller vers un renversement de Vladimir Poutine. Personne n'est en capacité de dire ce qui va se passer, ni demain, ni dans une semaine ».
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