Les réfugiés rohingyas au Bangladesh souffrent de précarité et d'insécurité
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Nous partons dans le Sud du Bangladesh, où vivent plus d’un million de réfugiés Rohingyas, ces musulmans chassés de Birmanie depuis des années. La plupart sont arrivés en 2017, lors de pogroms menés par l’armée birmane. Six ans plus tard, ils n’ont aucune perspective d’avenir et l'insécurité se développe dans les camps. Le récit de notre correspondant régional, qui est retourné dans plusieurs des camps où (sur)vivent ces réfugiés.

À première vue, la situation s’est stabilisée. Je me souviens de ma dernière visite dans ces camps, fin 2017 ; les Rohingyas venaient d’arriver et survivaient dans des huttes insalubres et des camps au sol instable, et subissaient des réguliers glissements de terrain meurtriers. Aujourd’hui, la vie est loin d’être idéale, mais les organisations de l’ONU qui gèrent ces 34 camps, ont pavé leurs allées et renforcé les structures des maisons, qui sont fabriquées maintenant en bois, bambous et tôle. Ces logements sont un peu plus confortables, surtout à cette saison sèche. L’ONU a aussi reboisé cette zone du sud du Bangladesh, qui avait été déboisée en urgence pour construire des maisons. Cela offre une couverture forestière, réduit la chaleur et stabilise les sols des camps, tout en préservant bien sûr l’éco-système.
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Mais la survie reste précaire...
Notamment concernant l’alimentation : ce million de Rohingyas n’a officiellement pas le droit de sortir des camps pour travailler. Ils sont donc censés dépendre de l’aide alimentaire du Programme alimentaire mondial. Or les pays donateurs viennent de réduire leur soutien au fonds pour les Rohingyas, certainement à cause des autres crises humanitaires mondiales. Aussi cette année, l’ONU a diminué d’un tiers les rations alimentaires. Un Rohingya a ainsi le droit à l’équivalent de 8 dollars par mois pour sa nourriture, ce qui lui offre à peine assez pour acheter du riz et de l’huile. Ils ne mangent quasiment pas de légumes, très peu de protéines, ce qui entraine des carences importantes. Tous les Rohingyas à qui j’ai parlé magouillent donc pour survivre. Une grande partie des hommes valides sortent des camps illégalement pour travailler comme ouvriers dans les villages voisins, ce qui les expose à la répression de la police.
Et l’insécurité grandit également
Les gangs de Rohingyas sont devenus de plus en plus violents, notamment dans le camp n°9. Ils agissent de nuit, à l’abri des regards des policiers bangladais, et enlèvent enfants ou adultes, pour demander des rançons à leurs proches. Une famille à qui j’ai parlé a dû vendre tout l’or qu’elle avait réussi à préserver en fuyant la Birmanie, pour libérer un proche. Mais les gangs ont recommencé, et après la deuxième libération, ils ont finalement décidé quelque chose d’improbable jusque-là : repartir en Birmanie, vivre illégalement dans la capitale Rangoun où ils espèrent être moins réprimés que dans leur région rurale d’origine de l’Arakhan.
(AFP) Quatre réfugiés rohingyas ont été tués lors d'une fusillade entre deux groupes d'insurgés au Bangladesh, a annoncé ce mercredi 6 décembre la police, marquant une nouvelle fois la détérioration de la sécurité dans les camps surpeuplés du pays. Le chef de la police locale, Shamim Hossain, a déclaré à l'AFP qu'une fusillade s'était déroulée pendant une heure mardi soir entre l'Armée du salut des Rohingyas d'Arakan (ARSA) et l'Organisation de solidarité Rohingya (RSO). « Quatre réfugiés rohingyas ont été tués et deux Rohingyas ont été grièvement blessés », a-t-il ajouté. Aucun des deux groupes n'a fait de commentaire dans l'immédiat sur la fusillade. Des groupes armés rivaux s'affrontent dans les camps de réfugiés dont ils se servent pour alimenter le trafic de drogue et d'êtres humains.
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Un nombre croissant montent aussi sur des bateaux de fortune pour essayer de gagner les côtes de Malaisie et d’Indonésie, un périple dangereux qui coûte la vie à de dizaines de Rohingyas par an. Les gangs armés disent vouloir combattre pour le droit des Rohingyas à repartir vivre décemment en Birmanie, mais ils agissent aujourd’hui comme des mafieux, et n’hésitent pas à abattre les personnes qui s’opposent à eux.
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