En Chine, les influenceurs invités à parler en bien de l’économie
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En Chine, la censure resserre la vis sur les contenus qui concernent l’économie chinoise. C’est une information de l’agence Bloomberg : certains influenceurs chinois se sont vus conseiller discrètement de parler en bien de l’économie chinoise.

On arrête d’évoquer les lendemains qui déchantent et on tourne sept fois sa souris sur son tapis d’ordi avant de poster un commentaire sur les difficultés que traverse la deuxième économie du monde. C’est un conseil discret, effectivement. Pas de communiqué officiel derrière cette information rapportée par Bloomberg. Plusieurs grands comptes ont ainsi fait part, la semaine dernière, de coups de fil des autorités leur demandant d’éviter de dénigrer l’économie chinoise.
Un utilisateur du réseau social Weibo spécialisé dans la finance qui a plus de 76 000 abonnés, raconte dans un post qu'on lui a demandé en privé de publier moins sur l'économie. Du coup, qu’est-ce qu’on fait quand on n’a pas de chat sous la main, eh bien, dit-il, on publie un commentaire sur « une vidéo légère de baseball américain ».
Un autre blogueur sur les marchés chinois, comptant plus de 16 000 abonnés, dit encore Bloomberg, a publié un avis distinct demandant aux blogueurs « d'éviter de franchir les lignes rouges », notamment sur les sujets économiques ou financiers. Alors ces conseils amicaux sont accompagnés d’un avis plus dissuasif du ministère de la Sécurité d'État.
C’était vendredi dernier sur le compte officiel WeChat de l’institution, affirmant que les avis négatifs sur la croissance chinoise mettent en danger la sécurité nationale : « Divers clichés destinés à saper l'économie chinoise sont apparus de manière constante, dans le but d'utiliser de faux récits pour construire un "piège discursif" et un "piège cognitif" selon lesquels la Chine est en déclin. Il s'agit d'une tentative de contenir et de supprimer stratégiquement la Chine », dit le communiqué.
Un signe d'inquiétude des autorités ?
C’est un peu l’histoire du verre vide et du plein... Comparée à d’autres économies développées, la Chine n’est pas forcément la plus à plaindre. Mais on n’a effectivement jamais eu autant de marqueurs dans le rouge. La crise immobilière qui plombe les recettes des gouvernements provinciaux, Moody’s qui s’inquiète de la stabilité de la dette chinoise, la consommation intérieure dans les choux, la stagflation... Et tout cela conduit à revoir le narratif pour les dirigeants chinois.
Ce n’est pas la première fois que cela arrive, les dirigeants chinois se livrent à ce genre d’auto confession régulièrement : lors de la réunion du comité central du Parti communiste chinois (PCC), il y a un peu plus d’une semaine, Xi Jinping a reconnu que la deuxième économie du monde traversait une mauvaise passe, mais pour mieux rebondir disait en substance le président chinois transformé pour l’occasion en lacanien et évoquant, comme Deng Xiaoping, autrefois la « dure vérité » et donc la réalité du développement de l’économie chinoise.
« La Chine doit encore surmonter certaines difficultés et défis afin de continuer à relancer l'économie » ont jugé les principaux dirigeants du PCC, dont le chef de l'État Xi Jinping, lors de la Conférence sur le travail économique, selon l'agence de presse Chine nouvelle citée par l’AFP. Toutefois, « dans l'ensemble, les conditions favorables l'emportent sur les facteurs défavorables » en matière de développement économique, ont-ils déclaré. « La tendance fondamentale d'une reprise économique et de perspectives positives à long terme n'a pas changé. » Un développement qualifié de « haute qualité » et plus seulement basé sur l’exportation de made in china à bas coût.
Or, « la réalité, c’est quand on se cogne », disait Lacan. Et, pour atténuer les bosses, l’appareil de propagande mouline à toute vapeur lui aussi pour changer le narratif avec, au-delà de la censure ou l’autocensure que nous avons évoquées précédemment, des éléments de langage dans les médias d’état orientés vers une « énergie positive », afin, selon le compte rendu de la réunion du politburo cité par Sinocism, de « renforcer la propagande économique et l'orientation de l'opinion publique, et promouvoir un récit positif sur les perspectives brillantes de l'économie chinoise ».
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