Philippines: vers une enquête de la CPI sur la lutte contre la drogue
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Aux Philippines, le soutien pour une enquête de la Cour pénale internationale dans le cadre de la lutte contre la drogue est en train de gagner du terrain. Cette lutte violente contre les stupéfiants a entraîné des milliers de morts dans le pays durant la présidence de Rodrigo Duterte entre 2016 et 2022. Pour échapper à une condamnation, ce dernier a quitté la CPI.

De notre envoyé spécial aux Philippines,
59% de Philippins souhaitent que les autorités collaborent avec La Haye. Un chiffre qui faisait d'ailleurs la Une des journaux ce 19 février. Ce sondage dévoilé ce dimanche 18 février par l’institut OCTA research s’inscrit au cœur d’un débat croissant dans le pays. Le président actuel Ferdinand Marcos Jr assure officiellement qu’il refuse de coopérer avec la CPI, sans empêcher formellement pour autant les enquêteurs de venir aux Philippines afin de mener à bien leur investigation sur « la guerre contre de la drogue ».
Lancée par le précédent gouvernement, celle-ci est toujours en cours actuellement, avec plus de 300 morts depuis l’arrivée de l’administration Marcos, selon un décompte du Dahas project de l’université des Philippines. Mais ce changement à la tête du pays a tout de même ouvert la porte à une forme d’espoir pour les familles des morts et les militants de la société civile qui espèrent que la Cour pénale internationale émettra bientôt un mandat d’arrêt à l’égard de Rodrigo Duterte.
Enquête ?
Comment est-ce que l’ex-président peut-être visé par une enquête d’une juridiction que son pays rejette ? La CPI peut toujours enquêter sur les crimes contre l’humanité sur la période durant laquelle les Philippines faisaient partie de l’organisation. À savoir entre 2011 et 2019 avant que le pays ne se retire du traité de Rome. Cela inclut quelques années de la présidence Duterte lorsque les meurtres arbitraires avaient lieu à l’échelle nationale et aussi les crimes commis lorsqu’il était maire de Davao, une ville au sud du pays. Des groupes armés surnommés « Davao Death Squad » ont commis des séries d’exécutions extrajudiciaires.
La question est posée sur la possibilité de voir Duterte réellement arrêté, car les juges pourraient se prononcer dans les prochaines semaines, ou mois selon des membres d’associations rencontrées ici. Mais même si un mandat d’arrêt est émis à son encontre, cela ne signifie pas qu’il sera mis derrière les barreaux. Pour l’instant, le président Marcos Jr. refuse la coopération avec la justice internationale. Une position héritée de son alliance avec la famille Duterte. Mais alors que les relations se tendent entre les deux grandes familles politiques, la possibilité d’une arrestation refait surface.
Un sujet d’autant plus sensible que Sara Duterte, la vice-présidente du pays et fille de l’ex-chef d’État, pourrait aussi être inquiétée par la CPI. Elle a succédé à son père en tant que maire de Davao. L’autre grand débat est la réaction des Duterte en cas de menace imminente d’une arrestation. Rodrigo Duterte est toujours très populaire aux Philippines et dispose d’importants soutiens dans le sud du pays et au sein de l’armée.
Difficile d’imaginer que l’ex-chef d’État popularisé se laisse faire. Il a déjà laissé courir des bruits de possibles coups d’État et menace que sa province de Mindanao fasse sécession. Il semble préparer la réplique et participera à un rassemblement politique de prière ce week-end contre une réforme constitutionnelle qui serait poussé par le clan Marcos. Une mobilisation religieuse étonnante pour celui qui avait auparavant insulté la mère du pape François.
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